
Thomas Van Hamme, né le 10 février 1969 à Bruxelles, est un éminent animateur belge, reconnu pour ses talents à la radio et à la télévision. Il incarne la deuxième génération d’une famille artistique, étant le fils du célèbre scénariste de bandes dessinées belge, Jean Van Hamme.
- Quelle a été votre motivation première pour entreprendre ce voyage introspectif à travers votre récit, et comment cela a-t-il évolué au fil de votre exploration personnelle ?
Le fait de coucher par écrit ce voyage vers moi fut d’abord une thérapie personnelle. Le besoin de mettre des mots sur ce qui bouleversait tout ce que j’avais construit jusqu’alors. J’ai commencé cet exercice quand je suis arrivé en Inde, première étape d’un année initiatique qui durera finalement quatre ans. J’ai ensuite mis de côté ce journal, pour le reprendre à chaque moment déterminant de cette introspection. C’est en voyant que je me consacrais désormais à enseigner la méditation qu’une éditrice m’a contacté, curieuse de ce parcours pas banal pour un ancien présentateur télé. J’y ai vu comme un signe. C’est ce qui m’a encouragé reprendre mes écrits pour en faire un livre, convaincu que je n’étais pas seul à vivre cette quête et, qu’en la partageant, j’allais peut-être aider certains à avancer sur ce chemin parfois douloureux mais au final si lumineux.
- Pouvez-vous nous parler des moments clés qui ont marqué votre décision de dévoiler les strates cachées derrière une façade de réussite et de perfection ?
Cela n’a pas été simple pour quelqu’un qui, comme moi, vivait depuis toujours dans l’image. Je m’étais construit un personnage sans même en être vraiment conscient. Éclairer mes zones d’ombres pour mieux faire la paix avec toutes mes parts m’a permis de me retrouver. Mais comment redevenir vraiment celui qu’on est si tout le monde pense encore à l’ancienne version de vous-même ? Révéler mon authenticité faisait donc partie du processus. Et c’était une nécessité pour que ce livre résonne. Il m’a fallut du courage pour l’offrir au monde mais aujourd’hui je sais qu’en faisant cela j’ai fait œuvre utile. Depuis que le livre est sorti, je reçois quantité de témoignages plus émouvants les uns que les autres. Preuve que nos histoires se font écho. Et que dans ce monde d’image et de superficialité, nous sommes de plus en plus nombreux à aspirer à davantage de vérité et de partage.
- Comment décririez-vous le processus de transformation que vous avez vécu, passant de l’effondrement d’un monde construit minutieusement à l’émergence d’une nouvelle version de vous-même ?
Il y a d’abord eu un sentiment de non-alignement qui coïncidait avec mes cinquante ans. Le fait d’être arrivé à obtenir ce que j’avais toujours désiré avec, en parallèle, la sensation de ne pas être complet pour autant. Comme un vide intérieur. Le voyage a débuté par hasard – mais le hasard existe-t-il ? – avec la découverte des médecines shamaniques qui ont mis à jour un traumatisme enfoui. Un viol subit enfant que mon cerveau avait occulté mais qui conditionnait la piètre image que je pouvais avoir de moi. J’ai alors compris que je me perdais à courir après des illusions pour tenter de panser cette blessure. Mais cela signifiait aussi que tout ce que j’avais construit jusque là n’avait plus vraiment de sens. C’est la mort de ma petite sœur à l’âge de 39 ans qui a été le détonateur. Le signal qui m’a fait comprendre qu’il était temps de lâcher l’ancien pour m’ouvrir à cette nouvelle version de moi-même.
- Quelles ont été les principales luttes intérieures que vous avez rencontrées lors de cette métamorphose, et quelles découvertes vous ont le plus marqué dans ce périple hors du commun ?
Lâcher l’ancien signifie renoncer à une grande part de sa vie d’avant. S’éloigner de certaines amitiés qui ne résonnent plus. D’habitudes tellement ancrées mais parfois néfastes qui ne nous conviennent plus. Ce qui implique de passer par de grands moments de solitude et de vide intérieur puisqu’on ne peut plus s’accrocher à ce qui constituait sa vie d’avant. Dans un parcours d’éveil de conscience, on appelle cela la nuit noire de l’âme. Quand tout s’écroule autour de soi et qu’on ne sait pas encore par quoi remplir cet immense vide qui s’est formé. C’est une étape très compliquée qui donne envie de revenir en arrière. Mais c’est impossible. Une fois ce chemin de detricotage de nos illusions entamé, un retour n’est plus envisageable. Puis, on découvre petit à petit ce qui se cachait derrière le personnage. On se reconnecte à la lumière qu’on a tous au fond de nous. On comprend qu’on est bien plus que son enveloppe terrestre : une énergie appelée la vie dont on est une émergence. Qu’on est connecté avec le tout et que nous créons jour après jour notre réalité. C’est la découverte de la spiritualité. De quelque chose d’indicible qui nous transcende et qui est amour pur.
- Pouvez-vous partager un moment particulièrement poignant ou révélateur que vous avez choisi de décrire dans votre récit, illustrant la fragilité de l’âme humaine et la nécessité de déconstruire pour reconstruire ?
Je suis parti en Inde pour trouver des réponses à la mort de Zoé, ma petite sœur. L’Univers m’a guidé vers Varanasi lors que ce n’était pas prévu. C’est dans cette ville sacrée, la plus ancienne au monde, qu’on brûle les morts le long du Gange. Mourir à Varanasi est une bénédiction pour les Hindous. C’est la garantie d’arrêter le cycle infernal des réincarnations. D’enfin trouver la paix. Voir ces cadavres brûler dans l’indifférence générale a été un électrochoc. Moi qui venait avec mes croyances occidentales, pensant que la mort était une fin et non le commencement d’autre chose. J’ai dû lâcher mes à-prioris et m’ouvrir à une autre vision de ce que pouvait être la vie et la mort. Comprendre que l’une fait partie de l’autre et que peut-être quelque chose de plus grand est à l’œuvre.
- Comment avez-vous navigué entre la révélation intime de vos propres expériences et la création d’un récit universellement accessible, capable de toucher les lecteurs dans leur quête de vérité et d’authenticité ?
Ma quête m’a amené à comprendre qu’elle était universelle et partagée par beaucoup depuis la nuit des temps. Mon récit est personnel mais j’ai l’espoir que le message qu’il porte touche des femmes et des hommes sur ce chemin de retour à soi. Me mettre à nu de cette façon était une manière de leur tendre la main pour que eux aussi aient le courage d’éclairer toutes leurs parts afin de mieux se retrouver. En toute humilité.
- En quoi votre ouvrage dépasse-t-il le cadre de l’autobiographie pour devenir une invitation à la réflexion et à l’éveil spirituel pour vos lecteurs ?
A l’heure où notre monde s’assombrit et se perd dans un individualisme de plus en plus forcené et des valeurs vides de sens, il y a paradoxalement de plus en plus de lumière même si elle n’est pas toujours visible, occultée même. Pourtant l’une ne peut pas exister sans l’autre. Nous assistons à un éveil de conscience massif. Et nous avons besoin de nous relier pour vibrer ensemble l’espoir d’une humanité nouvelle où l’amour, de soi, des autres et de tout ce qui porte la vie sera la règle. Mon livre n’est qu’une petite goutte mais porte les graines de l’espoir. Et plus les gouttes seront nombreuses, plus elles formeront un immense océan.
