Sorti rĂ©cemment au cinĂ©ma, LâHomme qui rĂ©trĂ©cit revisite avec une intensitĂ© rare le chef-dâĆuvre de Richard Matheson. Le film suit Paul, un homme dâaffaires passionnĂ© de navigation, dont la vie paisible bascule aprĂšs une sortie en mer. En traversant un Ă©trange brouillard lumineux, il sâexpose Ă un phĂ©nomĂšne inexpliquĂ© qui bouleverse sa biologie : son corps commence lentement Ă rĂ©trĂ©cir.
Dâabord imperceptible, le changement devient rapidement une malĂ©diction. Ses vĂȘtements flottent, les meubles paraissent immenses, sa femme peine Ă le reconnaĂźtre. Ă mesure que le monde grandit autour de lui, Paul voit son univers sâeffondrer : il perd son emploi, son statut, sa dignité⊠et bientĂŽt sa place dâhomme dans une sociĂ©tĂ© faite pour les « grands ».
RelĂ©guĂ© dans la cave de sa maison, il affronte un quotidien devenu absurde : un chat domestique devient un monstre, une fuite dâeau un torrent, une araignĂ©e un cauchemar mythologique. Le film bascule alors du drame intime au conte existentialiste, oĂč la lutte pour la survie se double dâune quĂȘte de sens. Car plus Paul rĂ©trĂ©cit, plus il semble sâapprocher dâune rĂ©vĂ©lation cosmique : mĂȘme rĂ©duit Ă lâĂ©tat dâinsecte, il fait encore partie du grand tout.
đ Explication de la fin de LâHomme qui rĂ©trĂ©cit
Dans les derniĂšres minutes, Scott Carey (dans la version originale du roman) atteint une taille microscopique. AprĂšs avoir vaincu lâaraignĂ©e et quittĂ© la cave, il se retrouve dehors, face Ă un jardin devenu jungle. Le ciel est immense, les brins dâherbe sont des forĂȘts, les gouttes de rosĂ©e des mondes liquides.
Mais au lieu de sombrer dans la terreur, Scott Ă©prouve une illumination : il comprend quâil ne disparaĂźt pas â il continue dâexister, simplement Ă une autre Ă©chelle.
Son regard embrasse alors lâinfiniment petit comme un univers Ă part entiĂšre. Il contemple les particules comme des Ă©toiles et ressent une union mystique avec la matiĂšre. Dans cet instant suspendu, la peur laisse place Ă la sĂ©rĂ©nitĂ©. Peu importe sa taille : il fait toujours partie du cosmos.
Matheson (et le film qui lui rend hommage) ne cherche pas à boucler une intrigue scientifique, mais à proposer une réponse métaphysique.
Le rĂ©trĂ©cissement devient une mĂ©taphore de la dissolution de lâego, une lente acceptation de lâimpermanence. Scott ne trouve pas de remĂšde, il trouve le sens.
đ Une fin ouverte, une leçon dâhumilitĂ©
La conclusion rejette tout spectaculaire. Il nây a ni retour Ă la normale, ni miracle de laboratoire.
Juste un homme minuscule qui comprend enfin que la grandeur nâest pas une question dâĂ©chelle.
Matheson (et le film de 2025 le rappelle avec beautĂ©) inverse le vertige : ce nâest plus lâinfiniment grand qui Ă©crase lâhomme, mais lâinfiniment petit qui le libĂšre.
Le rĂ©cit sâachĂšve sur une note dâĂ©merveillement cosmique : et si, en rĂ©trĂ©cissant Ă lâinfini, Scott entrait simplement dans un autre univers ?
Cette fin ouverte transforme lâangoisse existentielle en contemplation. Elle nous invite Ă rĂ©flĂ©chir sur notre place dans lâimmensitĂ© du monde â quâelle soit visible ou non.
Un geste audacieux, poĂ©tique, presque spirituel, qui rappelle que dans le cinĂ©ma de science-fiction, les plus grandes aventures se jouent souvent Ă lâintĂ©rieur de soi.
