Mothercloud de Rob Hart, le bonheur a toujours un prix

C’est quoi un roman post-apocalyptique ? Des cités en ruine, des hordes de morts-vivants affamés et des survivants prêts à s’entretuer pour une boîte de conserve ? Ou bien peut-on considérer que tout roman présentant un avenir sombre et angoissant peut-être considérer comme du post-apocalyptique? Le débat mérite d’être lancé car, une chose est sûre, le monde décrit dans cet ouvrage me terrifie bien plus que n’importe quel récit de zombie.

Le premier ouvrage de Rob Hart ne brille pas par son style, fluide mais sans particularité. L’auteur se concentre surtout sur les dialogues, les descriptions sont facilitées du fait que l’action se déroule au même endroit la majeure partie du temps. La force de ce roman tient à son intrigue glaçante qui se révèle au fur et à mesure de la lecture.

Telle une plante carnivore l’intrigue va engluer les personnages ainsi que les lecteurs avant de refermer cruellement ses mâchoires alors qu’il est déjà trop tard. La sournoiserie du management de Cloud et l’aspect pernicieux de la notation des employés est minutieusement reproduit par l’auteur. Les personnages se retrouvent rapidement complètement aliénés dans leurs postes respectifs. Le dérouler d’une journée type de Zinnia est tout simplement abrutissant tandis que Paxton va petit à petit perdre ses repères et ses résolutions. Sa transformation psychologique est amenée subtilement, par le biais de petits détails et avant même qu’il ne puisse s’en rendre compte il se retrouve endoctriné, incapable de saisir les mensonges de façade et la manipulation dont il est victime.

Ses deux personnages sont convaincant et attachants chacun à leur manière. Paxton représente David, le petit entrepreneur dépassé par Goliath, l’entreprise surpuissante et invincible. Zinnia est plus cynique, plus combative aussi mais elle finit elle aussi par montrer des failles. La relation qui se noue entre eux, sans être renversante d’émotions à fleur de peau, est convaincante.

L’auteur a tenu à ne pas présenter un discours manichéen et rappelle une vérité que les détracteurs d’amazon, qui est clairement visée dans ce récit, ont tendance à oublier. Si cette entreprise a pu acquérir autant de pouvoir c’est que nous, consommateur, nous l’avons laissé faire. La réponse à cette emprise est tout sauf simple. L’auteur a tenu à donner un ton mature à son récit avec une fin ouverte rassurante mais insiste sur le fait que les conséquences seront élevées et irrémédiables. On ne s’extirpe pas du piège de la plante carnivore sans en payer le prix.

Impossible de terminer cette chronique sans évoquer le cynisme absolu dont fait preuve cette entreprise tentaculaire prête à tout pour multiplier les profits, un cynisme qui n’a pas attendu des fictions qui dépeignent un futur catastrophique pour étreindre les hommes d’affaires de ses serres cupides. Un cynisme, qui allié à la technologie implacable et la faiblesse des gouvernements leur assure une victoire sur une société qui change plus vite que sa population ne peut l’intégrer. Un récit effrayant qui rappellera aux connaisseurs les meilleurs épisodes de la série black mirror.

Résumé: Ex-petit patron désormais ruiné, Paxton n’aurait jamais pensé devoir intégrer une unité MotherCloud, cette superstructure de l’e-commerce qui a dévoré la moitié de l’économie mondiale. Pourtant, dans une société n’ayant plus rien à offrir, comment peut refuser un job qui propose non seulement un salaire, mais aussi un toit et à manger ?
La jeune Zinnia non plus n’aurait jamais pensé rejoindre MotherCloud, mais sa mission est tout autre : une révolution est en marche dont elle est le bras armé. Devenir salariée n’est qu’un premier pas pour infiltrer le système, en percer les secrets. Le détruire.

  • Broché : 416 pages
  • ISBN-10 : 2714480918
  • ISBN-13 : 978-2714480910
  • Dimensions du produit : 14.1 x 3.7 x 22.6 cm
  • Éditeur : Belfond (5 mars 2020)

MASKEY ET MALEC : L’INTERVIEW !

Rencontre avec les auteurs de la bd : Follow me chez Glénat.

Lien de la chaine You tube de Maskey: https://www.youtube.com/channel/UCFfukyWXS7h1viyLMYLl19A

Lien de la Bd: https://amzn.to/34RsDW8

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L’INTERVIEW

Maskey

1. Quelles sont les thématiques que tu abordes sur ta chaîne ?

Ma chaîne parle de rap, de culture urbaine et j’essaie de me diversifier avec des contenus comme « rétroland » dans lesquels je parle des années 1990 et de ma jeunesse.

2. Le hip hop a une place centrale dans ta culture. Comment introduire cette dimension musicale dans la bande dessinée, un médium par définition muet ?

La culture urbaine est très importante pour moi et j’ai voulu illustrer cela à travers le personnage de Mike. J’ai vraiment voulu montrer le côté « mec qui galère » plutôt que le rappeur déjà installé, bling bling et riche, car je trouve que l’on caricature trop ce genre de rappeurs. Je voulais plutôt montrer un mec tellement passionné par le rap qu’il finit par devenir un micro vivant, je trouvais ça vraiment plus drôle que le cliché du rappeur qui a déjà percé.

3. Dans quelle mesure Follow me s’inscrit-il dans la continuité de ce que tu pratiques sur ta chaîne ?

À part quelques clins d’oeil, Follow me est très différent de ce que j’ai l’habitude de proposer. Je ne voulais pas tomber dans le piège de la personne influente sur internet qui se considère assez légitime pour faire une autobiographie romancée. Je ne me trouve pas assez intéressant pour faire quelque chose dans ce style-là. Pour rappeler ma chaîne j’ai juste gardé les couleurs et les thématiques « reptiliens/illuminatis » que j’ai adaptés à la BD. Mais sinon, le sujet est différent de ceux que j’aborde sur Youtube.

4. Te reconnais-tu dans un de tes personnages ?

Je me reconnais dans chacun des personnages. Je peux être mégalo comme Steve mais je suis prudent dans mes décisions comme Allan. Plusieurs facettes de ma personnalité ont été réparties dans chacun des personnages. J’ai préféré faire comme cela plutôt que de faire un personnage exactement comme moi.

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Malec

1. Tu t’es fait connaître notamment grâce aux vidéos mash up « Et si … était un anime » : comment t’es venue cette idée ? T’attendais-tu à un tel succès ?

À la base je voulais faire « Si The Witcher était un anime… », mais j’avais mis ça de côté pour développer d’autres projets. Puis, quelques mois plus tard, Narmak un youtuber américain a sorti un opening de Bob l’Éponge en mode manga et Maskey m’a dit : « Ça pourrait être une bonne idée de faire “Si Game of Thrones était un anime”, ça va cartonner ». Il m’a mis en relation avec Kronomuzik, un youtuber musicien de talent. Il a fait la musique, j’ai fait le chant et le dessin animé. Ça a tout de suite pris ! Ce qui m’a motivé à faire « Si Rick et Morty était un anime » avec mon collectif Malec & Co. qui a très bien marché lui aussi.

2. Tes dessins pour Follow me rappellent les univers de Seth Mac Farlane (American Dad, Family Guy). Est-ce une référence directe ? Quelle place occupe cet artiste et plus généralement l’animation américaine dans ton travail ?

C’est une volonté de Maskey. Il voulait un style similaire, ce que j’ai fait. Ce projet allait dans mon sens car j’aime Family Guy et American Dad, tant au niveau visuel qu’au niveau du ton. Et les séries américaines, leur rythme et leur humour, sont en général pour moi une grande source d’inspiration (South Park, Les Simpsons, Rick et Morty, etc.). Il y a beaucoup plus de liberté créative aux États-Unis qu’en France, donc plus de richesse. C’est très inspirant.

3. Follow me regorge de personnages hauts en couleurs, tant sur le plan psychologique que physique. Comment les avez-vous imaginés en terme de design ? Quel est ton personnage préféré ?

Maskey avait une vision très précise de ses personnages. Du coup, il me suffisait d’écouter ce qu’il me disait pour les mettre sur le papier. Mon perso préféré c’est Mike, le micro qui parle. Complètement absurde et idiot.

 

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