Maus d’Art Spiegelman, prière pour les souris

J’ai onze ans, peut-être douze, le CDI de mon collège est déjà un refuge pour échapper au brouhaha de la cour de récréation. Parmi les rayonnages de livres et de BD que je commence à connaître par cœur, je suis intrigué par une BD en deux volumes qui représente sur sa couverture deux souris anthropomorphes surplombés par un drapeau nazi menaçant. Le titre ne me dit rien, Maus, ça veut dire quoi Maus ? se demande l’adolescent inculte que je suis. Je ne le sais pas encore mais mon âme d’enfant va disparaître ce jour-là.

Jusqu’ici l’Holocauste était pour moi une page sombre de notre histoire. Cela évoquait en moi une longue procession de victimes anonymes en noir et blanc, marchant vers la mort. Une page lointaine de l’histoire qui ne me concerne pas. Maus va tout changer, tout anéantir et tout reconstruire.

Soudainement les victimes ont un visage, un corps, une personnalité, une âme et un cœur. Ce ne sont plus des silhouettes squelettiques aperçues lors des reportages télévisuels mais des êtres vivants dont le témoignage me soulève le cœur au plus fort d’une tempête émotionnelle sans nom, dont les destins m’écorchent le cœur aux lames de l’Histoire. Mes joues ne sont pas réchauffées par les rayons du soleil, ce jour-là, mais par le sel de mes larmes.

Aujourd’hui ce chef-d’œuvre fait de nouveau parler de lui suite à la campagne de pudibonderie dont seuls les États-Unis savent nous régaler. Résultat, on n’a jamais autant parlé de cette pierre importante de l’édifice mémoriel. Et de me dire que, peut-être un élève curieux n’aura jamais l’occasion de porter les yeux sur cet ouvrage parce qu’un adulte, qui se croit bienveillant, en a décidé autrement.

Alors j’ai décidé de témoigner moi aussi. À ma petite échelle, sur ce que ce récit m’a apporté, sur l’adulte qu’il a contribué à ce que je devienne. Je voudrais que mon petit statut d’amoureux des livres serve, à travers ce post, à rappeler combien il est important de se remémorer ces ténèbres qui ont hanté le monde.

Alors souvenez-vous.

Résumé : Récompensé par le prix Pulitzer, Maus nous conte l’histoire de Vladek Spiegelman, rescapé de l’Europe d’Hitler, et de son fils, un dessinateur de bandes dessinées confronté au récit de son père. Au témoignage bouleversant de Vladek se mêle un portrait de la relation tendue que l’auteur entretient avec son père vieillissant.

Éditeur ‎Flammarion (14 janvier 2012)
Langue ‎Français
Relié ‎295 pages
ISBN-10 ‎2081278022
ISBN-13 ‎978-2081278028

BLOC 11 (7 septembre 2016) de Piero Degli Antoni

New York, milieu des années 1990. Par une belle journée ensoleillée, Moshe, un vieil homme, entend une expression allemande – Mützen ab ! – qui le ramène cinquante ans en arrière.
Auschwitz, 1944. Trois prisonniers viennent de s’évader. Par mesures de représailles, le commandant du camp désigne dix détenus. Cependant, au lieu de les exécuter, il les enferme une nuit dans le bloc 11.
Au petit matin, ils devront désigner celui d’entre eux qui sera fusillé. Pendant ce temps, le commandant du camp se livre avec son jeune fils à une étrange partie d’échecs…
Moshe se souvient de cette nuit-là et de sa détention par un terrible voyage au fond des ténèbres. Et c’est alors qu’un inconnu sonne à sa porte…

Critique : L’argument de départ est mince. Un vieil homme qui prend le ferry entend des paroles qui le ramènent à la période où il était à Auschwitz et bien sûr le passé du camp ressurgit. Le commandant avait fait enfermer une dizaine de prisonniers, dans le bloc 11, qui devaient décider lequel d’entre eux serait fusillé. Pendant ce temps ledit commandant joue aux échecs avec son fils et donne à chaque pion le nom d’un homme du bloc 11. Chaque dérapage le réjouit, bien sûr. Nous avons là une sorte de jeu de rôles, ou de chat et de souris, comme on veut, avec des chances très inégales. Après beaucoup de tergiversations et de règlements de comptes, les prisonniers décident de faire bloc et d’en aider un à s’évader ce qu’il fera. C’est lui que nous retrouvons sur le ferry aux prises avec son passé et une apparition inattendue qui lui apportera l’apaisement. Ce n’est pas mal mais j’ai déjà lu tant de livres sur le sujet, et des bons, et des forts, que j’aurais tendance à dire, oui, pas mal mais ça n’apporte rien de nouveau, ça n’est qu’un de plus…

Note : 8/10

 

  • Poche: 280 pages
  • Editeur : Archipoche (7 septembre 2016)
  • Collection : Roman étranger

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