Le temps du passé de Lee Child

Rien ne peut arrêter Reacher

Le verbe To reach en anglais signifie atteindre, et s’il y en a bien un qui sait atteindre sa cible c’est lui, Jack Reacher, le héros de Lee Child. Après plus de vingt volumes l’auteur se décide enfin à explorer les origines de son héros.

Mais avant tout Reacher c’est qui ? Fils de Marines, rompu à une discipline militaire draconienne, il a été officier dans la police militaire avant de démissionner lorsque l’armée américaine se transforme en complexe industriel se fichant de la vie des hommes auxquels elle fait porter l’uniforme. Depuis il erre sur les routes des USA, vagabond moderne qui se contente de peu mais qui donne tout lorsqu’il se heurte à l’injustice et la malveillance.

Ces quelques lignes résument le concept de la saga Reacher. Chaque volume peut se lire de manière indépendante. L’atout majeur est bien sûr le personnage de Reacher, bloc de granit incassable à l’esprit analytique aussi affûté que la vision d’un aigle. Un savant équilibre entre Sherlock Holmes et Chuck Norris. Une saga qui assume pleinement son aspect série B.

Ce volume ne fait pas exception à la règle. Reacher débarque dans un patelin pas si tranquille et commence à mettre son nez là où personne ne veut qu’il le mette. Parallèlement on va suivre les mésaventures d’un jeune couple de canadiens qui vont faire un choix qui va s’avérer funeste.

Si la partie concernant Patty et Shorty se révèle très vite prévisible, elle a le mérite d’offrir un final explosif où l’auteur démontre son talent pour le récit de combat nerveux. L’intrigue concernant Reacher et les secrets de sa famille se révèle éparse et moins passionnante. Comme si l’auteur regrettait, après coup, d’avoir entraîné son personnage dans cette voie. Car, pour le bien de la saga, Reacher se doit de rester cet homme sans attache, sans passé ni avenir.

Pour compenser l’auteur confronte son personnage à quelques bouseux vindicatifs autour d’une vague question d’expansion illégale d’une pommeraie et d’agression sexuelle. On est loin des complots que l’auteur se plaisait à démanteler dans les tomes précédents.

Un volume un peu en deçà de ce que l’auteur avait l’habitude de proposer et qui accentue un essoufflement de la saga qui se fait sentir depuis quelques tomes. Le final épique ne suffit pas à rattraper l’ensemble, un brin mollasson.

Résumé :  au bord d’une route, le pouce levé, Jack Reacher a la ferme intention de traverser les États-Unis en stop. Mais dans les bois de la Nouvelle-Angleterre, un panneau lui indique une ville au nom familier : Laconia, où son père est né. Il décide de faire le détour et découvre qu’aucun Reacher n’y a jamais vécu. Lui a-t-on menti ?
Non loin de là, un couple de jeunes Canadiens tombe en panne et échoue dans un motel. Les propriétaires promettent de les aider à repartir. Mais ces derniers disent-ils toute la vérité ?
Les chemins de tous ces personnages vont se croiser dans de terribles circonstances, car la mort rôde dans les parages… et Reacher, fidèle à lui-même, va devoir s’en mêler

Éditeur ‎Calmann-Lévy (21 septembre 2022)
Langue ‎Français
Broché ‎432 pages
ISBN-10 ‎2702180019
ISBN-13 ‎978-2702180013

Les exfiltrés de Berlin d’Harald Gilbers, L’horreur ne disparaît jamais, elle change juste de nom.

La précédente enquête de l’inflexible commissaire Oppenheimer m’avait séduite par son réalisme historique mais déçu par son intrigue prévisible au possible. Il est rare qu’une saga policière se bonifie avec le temps mais cela semble être le cas ici avec un nouveau récit moins attendu.

Autant être clair d’entrée de jeu, les twists renversant ne seront jamais l’apanage de l’auteur. Ce dernier préfère tisser une atmosphère oppressante, une ambiance paranoïaque dans une ville de Berlin qui a du mal à se remettre de la Seconde Guerre mondiale.

À défaut d’une enquête qui enchaîne les révélations, le récit propose une intrigue solide, rythmée avec une dose d’espionnage et de politique anxiogène qui laisse se profiler la guerre froide. Il n’y a guère qu’une décision invraisemblable prise par les personnages vers la fin qui m’a fait lever les yeux au ciel.

Mais, encore une fois, c’est surtout par sa retranscription du quotidien du peuple berlinois que l’ouvrage fait merveille. L’auteur nous fait partager la misère, l’amertume et la fierté d’un peuple qui n’a pas encore pu tourner la page de sa sombre histoire. Le quotidien des Berlinois nous est conté avec un réalisme clinique, les privations, le désarroi mais aussi la peur de ne pas voir le bout de ce sombre tunnel. Le tout par le regard acéré du commissaire Oppenheimer qui nage constamment en eaux troubles, témoin privilégié du théâtre sanglant qu’est devenu sa ville.

Harald Gilbers signe une honnête saga policière, habitée par un souci du réalisme historique et des personnages ambigus crédibles. La période complexe de l’après-guerre est une mine d’histoires idéales pour de sombres récits policiers.

Résumé : Berlin, 1947. Dans une capitale allemande divisée et affamée, le commissaire Oppenheimer est appelé sur le lieu d’un crime banal : un cambrioleur tué par le locataire de l’appartement dans lequel il est entré par effraction. Un cas d’autodéfense classique ? Oppenheimer en doute et découvre des zones troubles. Pendant ce temps, son collègue Billhardt disparaît en pleine enquête sur la mort d’un pickpocket retrouvé avec d’étranges documents sur lui. Oppenheimer comprend que les deux crimes sont liés et se retrouve bientôt confronté à un réseau secret d’exfiltration d’anciens nazis vers l’Argentine. Encerclé par les traîtres jusque dans les rangs de la police, il aura fort à faire pour ne pas sombrer.

Éditeur ‎Calmann-Lévy (26 mai 2021)
Langue ‎Français
Broché ‎448 pages
ISBN-10 ‎2702182321
ISBN-13 ‎978-2702182321