Terminus de Tom Sweterlitsch, boucle infernal

Ce roman je l’aurais attendu longtemps mais quand j’ai enfin eu l’occasion de me plonger dedans le voyage ne m’a plus qu’à moitié. Est-ce moi qui en ai trop attendu ou bien l’ouvrage souffre-t-il de défauts qui me l’ont rendu indigeste ?

Commençons avec les points positifs du roman. La narration de l’auteur est maligne. Il va enchaîner les paragraphes introspectifs, sans réel développement de l’intrigue avant de brusquement enchaîné surnune scène d’action digne des meilleurs films thrillers hollywoodien. Il y a d’ailleurs une manière très américaine de traiter l’action, les fusillades, les combats. Ces scènes sont très cinématographiques et agissent comme des décharges électriques qui relancent l’intérêt pour la lecture. L’on va vivre tous ces scènes par le point de vue de Shannon Moss, le personnage principal, dont le développement m’a laissé débutatif.

Ce personnage est lancé dans une course contre le temps. Une course qu’elle ne peut évidemment pas gagner. Ce qui explique peut-être son caractère impulsif et tête brûlée. Le problème ce que ce genre de personnage à tendance a très vite m’irriter. Que Shannon fonce droit vers une probable planque de terroriste une fois d’accord mais elle répète ce genre d’imprudence plusieurs fois au cours du récit. Et sur un récit qui s’étale sur 400 pages c’est pénible. Il y a même un passage que je considère comme une incohérence, où Shannon aurait dû se méfier d’un personnage ou lieu de lui faire bêtement confiance mais le récit étant dense et les personnages sujets à de grands changements de par la narration c’est peut-être moi qui n’ai pas saisi un détail. En tout cas ce passage étant une scène charnière du récit cela m’a sorti du récit.

La bonne idée de Sweterlitsch est d’avoir incorporé son récit de science-fiction dans une narration de thriller. Ainsi les éléments se rattachant au domaine de la science-fiction, comme les voyages temporels, les vaisseaux spatiaux prennent ancrage dans un univers où l’homme a dompté la science. Aucun personnage n’est jamais vraiment surpris d’apprendre que Shannon voyage dans le temps ni qu’il existe un département d’État consacré à l’étude des voyages temporels. Cela permet à l’auteur de donner un cadre précis à son récit. Malheureusement cela l’enferme aussi dans une sorte de vase clos qui empêche à ses même éléments de prendre de l’ampleur.

Comme je l’ai dit plus haut tous les personnages sont au courant de l’existence des voyages temporels, que ce soit les alliés ou les adversaires de Shannon. Tout le récit baigne dans une atmosphère d’agents secrets, d’agents gouvernementaux et je crois que c’est de là que vient mon ressenti mitigé. Le récit manque d’un personnage étranger à ce milieu, qui le découvrirait avec des yeux ébahis et permettrait ainsi à cette avancée scientifique fantastique de prendre de l’ampleur. Un personnage par les yeux duquel on découvrirait les voyages temporels, ses effets secondaires, ses dangers et ses risques. Là l’auteur a choisi de tout nous livrer par les yeux d’un personnage aguerri qui balance ses informations comme si elle écrivait un rapport. Cela manque d’une approche plus innocente, plus humaine.

Un autre point d’achoppement entre cet ouvrage et moi concerne les antagonistes que Shannon traque. Autant l’auteur est parvenu à livrer aux lecteurs un univers dense de manière concise, au final 400 pages c’est peu au vu de la richesse du thème, autant le groupe de terroristes souffre d’un manque d’écriture. Je reproche à Shannon d’être impulsive mais c’est un personnage à part entière, elle a une voix, une épaisseur dont manquent les adversaires qu’elle affronte. Leurs motivations paraissent prévisibles et leur caractérisation trop grossière pour être crédible. Cela aurait mérité un peu plus de développement.

C’est étrange comment un ouvrage peut vous plaire et vous décevoir en même temps. Le personnage de Shannon est attachant, c’est une femme meurtrie dans sa chair et qui a le sens du sacrifice ce qui la dote d’une grandeur d’âme indéniable mais son impulsivité la dessert trop souvent pour en faire un personnage dont je me souviendrais. L’univers mis en place par l’auteur est passionnant mais son approche militarisée pour l’introduire m’a déconcerté. Pas une mauvaise lecture en soie mais pas une lecture mémorable.

Résumé: Depuis le début des années 80, un programme ultrasecret de la marine américaine explore de multiples futurs potentiels. Lors de ces explorations, ses agents temporels ont situé le Terminus, la destruction de toute vie sur terre, au XXVIIe siècle.
En 1997, l’agent spécial Shannon Moss du NCIS reçoit au milieu de la nuit un appel du FBI : on la demande sur une scène de crime. Un homme aurait massacré sa famille avant de s’enfuir. Seule la fille aînée, Marian, 17 ans, serait vivante, mais reste portée disparue. Pourquoi contacter Moss ? Parce que le suspect, Patrick Mursult, a comme elle contemplé le Terminus… dont la date s’est brusquement rapprochée de plusieurs siècles.

  • diteur : Albin Michel (24 avril 2019)
  • Langue : Français
  • Broché : 448 pages
  • ISBN-10 : 2226439935
  • ISBN-13 : 978-2226439932
  • Poids de l’article : 500 g
  • Dimensions : 14 x 3 x 20.5 cm

DCEASED Hope at world’s end de Tom Taylor et Marco Failla(entre autres), bien maigre espoir…

Une trinité de belle gueule

La saga DCEASED initié par Tom Taylor prend une ampleur insoupçonnée que DC comics et son éditeur français Urban comics mettent beaucoup en avant. Il faut dire que les récits post-apocalyptique où l’on assiste à la chute de l’humanité on toujours le vent en poupe. Ce nouveau volume nous invite à suivre de nouveau les héros dans leur lutte désespérée contre l’équation d’anti-vie qui a transformé la population, et certains héros, en zombies déterminés à répandre l’épidémie. Ce troisième volume apporte-t-il du renouveau à la saga ou se contente-t-il de surfer sur la tendance du moment ?

C’est le moment de paniquer !

Le problème de ce troisième volume ne vient pas de la qualité du récit en soi, Tom Taylor parvient à maintenir une tension palpable et une angoisse pour les personnages bien connus de l’univers DC grâce à un rythme soutenu et une bonne utilisation des personnages. Même si l’on peut constater qu’il se répète dans certaines scènes. La scène entre Stéphanie Brown et Damian Wayne en  rappelera une autre entre Catwoman et Batman dans le comics Injustice qui raconte une autre itération dramatique de l’univers DC et qui est aussi scénarisé par Tom Taylor. Un autoplagiat que j’ai interprété comme une paresse d’écriture mais de manière globale l’auteur est toujours aussi doué pour mettre en scènes ses personnages et leur accorder de la profondeur en quelques pages. L’intrigue reprend le même schéma que dans les tomes précédents, l’épidémie se répand à une vitesse effrayante et les héros doivent faire face du mieux qu’ils peuvent.

Bis repetita

Au niveau des dessins il y a boire et à manger. Si Marco Failla et Renato Guedes sont les artistes principaux on peut aussi admirer le trait superbe de Carmine Di Giandomenico, un artiste que j’aimerais voir plus souvent mais aussi Dustin Nguyen sur les premières pages ainsi que Karl Master pour un court récit dont on se demande ce qu’il fait là. L’ensemble est suffisamment homogène pour que la lecture reste harmonieuse. Le trait dynamique de Failla est celui que l’on retrouve le plus au cours des épisodes. L’artiste a un trait fin et cartonny qui correspond plutôt bien au trio de héros que l’on suit durant une partie du récit, à savoir les héritiers de Batman, Superman et Wonderwoman. Il n’y a que sur certains visages que l’auteur n’accorde pas assez d’attention et qui paraissent du coup bâclé.

Talia Al Ghul a pris cher là

Mon problème sur ce volume tient au rapport qualité-prix. Le travail éditorial d’Urban comics n’a rien de déshonorant, l’ouvrage est de qualité mais il n’en reste pas moins que l’on a l’impression de lire une série de courts récits qui aurait pu être incorporé au premier volume de la saga. Le récit qui met en scène flash est tellement court et n’a rien à voir avec le reste de l’album qu’il aurait pu être inséré dans les volumes précédents. On a l’impression d’enchaîner la lecture de backs-up, de courts récits que les éditeurs insèrent à la fin d’un numéro mensuel pour mettre en avant des aspects secondaires de l’intrigue, et qui finissent par former un récit cohérent. Mais le fait est qu’à 17 euros les 176 pages ça fait cher le récit secondaire. La passion des comics reste une passion onéreuse et je vous conseillerais plutôt d’attendre une réédition en intégrale plutôt que de vous jeter sur ce tome de la saga DCEASED somme toute assez dispensable.

Résumé: L’équation anti-vie a infecté plus d’un milliard de personnes sur Terre. De chaque côté de l’échiquier, héros comme vilains, nombreux sont ceux qui lui ont succombé. Immédiatement après la destruction de Metropolis, Superman et Wonder Woman mènent un effort pour endiguer la vague d’infection, préserver et protéger les survivants et essayer d’entrevoir la lumière au bout du tunnel. À l’heure la plus sombre de la Terre, l’humanité fait face à son plus grand défi, ne pas perdre espoir, quand tout semble déjà perdu.

  • ASIN : B08Q6SQW9F
  • Éditeur : URBAN COMICS (9 avril 2021)
  • Langue : Français
  • Broché : 176 pages
  • ISBN-13 : 979-1026828549
  • Poids de l’article : 750 g
  • Dimensions : 18.7 x 1.7 x 28.3 cm

L’un des tiens de Thomas Sands, ainsi meurt les hommes

L’éditeur les arènes entretient une ligne éditoriale exigeante en matière de style et de sujets à aborder. Les œuvres parus au sein de la collection equinox mélangent polars et roman noirs avec toujours cette volonté de pousser à la réflexion sur des sujets de société alarmants. Le deuxième roman de Thomas Sands ne déroge pas à la règle et pousse encore plus loin la noirceur et le désespoir.

L’auteur s’empare du genre post-apocalyptique pour nous conter un récit d’une noirceur absolue. N’espérez pas apercevoir la moindre lueur d’espoir dans ce récit sans concessions. L’auteur fait le bilan d’une société à bout de souffle, d’un modèle occidental qui s’est effondré pour laisser la part belle à la sauvagerie et la violence qui se tapissent dans le cœur des hommes. Seuls les chapitres où Timothé, le frère fugitif, occupe les paragraphes sont écrits dans un mélange de poésie naturaliste mélancolique. Une respiration bienvenue dans un récit si oppressant par ailleurs.

Les chapitres où l’on suit Marie-Jean sont très intimiste. La narration désabusée nous fait plonger dans la psyché d’un personnage en bout de course, qui n’attend plus rien du monde. Son monologue intérieur résonne comme une plainte lancinante de désespoir. C’est par son point de vue que l’auteur nous livre les détails de la chute du monde occidental et des conséquences que doivent endurer les survivants. Cela fait de lui le personnage auquel on peut le mieux s’identifier et le plus incarné du récit mais c’est également un personnage écrit à rebours, un peu comme son nom. Il part en quête alors qu’il n’a plus rien à espérer et cesse de se battre alors qu’il a enfin trouvé une raison de survivre. . En bon narrateur, Marie-Jean délivre de manière succincte les éléments qui ont fait de lui cet errant nihiliste jusqu’au final où le barrage mental de ses secrets s’effrite dans une déferlante sanglante.

Enfin il reste le troisième personnage de ce conte macabre. Une femme, Anna, il faudra attendre la page 56 pour qu’elle prononce son nom pour la première fois. L’auteur a choisi d’en faire volontairement un personnage désincarné. Un fantôme qui ne retrouvera la vie qu’au contact de Marie-Jean. Ces chapitres seront l’occasion de voir une autre facette de l’apocalypse. Ils sont écrits avec une plume plus organique, c’est la danse des corps qui se touchent, qui se pénètrent dans des étreintes sans joie comme si seul le sexe prouvait encore la vie. À mesure que son destin va se mélanger à celui de Marie-Jean, Anne s’incarnera un peu plus chapitres après chapitres, contaminée par le désespoir de son compagnon et par sa sombre quête. Le robot de chair des premiers chapitres acquiert pages après pages une âme et un cœur qui bat pour son plus grand malheur.

Par petites touches l’auteur met en avant tout ce qui pourrait mener notre société civilisée à sa perte. Des sujets certes inquiétants et qui méritent que l’on se batte pour changer de mode de vie mais qui, accoler les uns aux autres au fil du récit, s’annulent un peu et prennent un tour caricatural. Comme si l’auteur s’était efforcé de cocher toutes les cases des thèmes qui pourraient mener à l’apocalypse alors que le désastre géothermique cité en fin d’ouvrage était déjà bien suffisamment angoissant pour décrire son apocalypse.

En définitive ce roman noir et macabre, parcouru de sanglantes touches gores, m’aura bien plus convaincu par sa plume désespérément belle que par sa réflexion sur notre mode de vie occidental trop survolée et diffuse pour être pertinente.

« L’aurore est violente. Comme la fente d’une vierge ouverte avec le poing. C’est la dernière fois. Elle s’en ira.”

Résumé: Le pays s’effondre sous leurs yeux. La violence rôde. Ils sont deux à rouler à bord d’une voiture volée. Elle laisse derrière elle un amour tué par les flics. Il s’est lancé sur les traces de son frère disparu. Les régions qu’ils traversent sont des champs de bataille. Ils croisent un peuple ravagé par la peur et les épidémies. Ils apprennent à aimer ce qui leur manque. Ils essaient aussi d’inventer un chemin.

  • Broché : 299 pages
  • ISBN-13 : 979-1037500557
  • Poids de l’article : 280 g
  • Dimensions du produit : 12.5 x 1.7 x 20.5 cm
  • Éditeur : Les Arènes (30 septembre 2020)
  • Langue : : Français

Zombie Story, T1 : Zombie Island (11 Mars 2020) de David Wellington

À la suite d’une catastrophe mondiale les pays les plus développés sont envahis par des hordes de zombies cannibales. Seules quelques enclaves subsistent, en Somalie notamment. À la recherche d’un remède au virus, un groupe d’adolescentes surarmées, menées par un vétéran, se rend à New York.

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Chronique : David Wellington s’est fait spécialiste de la réécriture de mythe moderne. Je garde un excellent souvenir de ma lecture de Positif, son précédent ouvrage sur les zombies et la fin du monde. Visiblement il n’avait pas encore tout dit sur le sujet.

Dès les premières pages il est évident que l’auteur a voulu écrire la série B, ou Z comme vous voulez, ultime. Il convoque tous les ingrédients pour faire du premier tome de cette trilogie un concentré d’action pure sans aucun temps mort. On retrouve donc le personnage principal obligé de se lancer dans une quête périlleuse par amour de ses proches, en l’occurrence sa fille, ainsi que la bande de guerrières déchaînées et armés jusqu’aux dents. Le personnage de Dekalb est un digne héritier d’Ulysse, c’est à dire un héros sans force physique particulière, un peu lâche et qui devra apprendre à compter sur son intellect et sa débrouillardise pour espérer se sortir vivant de cette morgue à ciel ouvert qu’est devenue New York.

Lui et Gary sont les deux seuls personnages qui disposent d’un réel développement. Le récit étant essentiellement concentré sur l’action. Comme dit plus haut, le récit ne souffre d’aucun temps mort et l’intrigue, une fois que l’on a accepté son côté fantastiquement loufoque, offre de sacrés moments de suspens et de déferlements d’adrénaline.

L’action culmine jusqu’à un final dantesque dans central park et une fin ouverte qui ne laisse qu’une seule interrogation, celle de savoir comment l’auteur va orienter la suite.

Un récit a dévorer pour tous ceux qui cherchent un exutoire facile d’accès. Une série B sanglante qui ne prétend pas être autre chose et c’est exactement ce que l’on attend d’elle.

Note : 8,5/10

 

  • Poche : 416 pages
  • Editeur : Bragelonne (30 mai 2013)
  • Collection : FANTASTIQUE
  • Langue : Français
  • ISBN-10 : 2811210563

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