Pastorale américaine de Philip Roth

Après trente-six ans, Zuckerman l’écrivain retrouve Seymour Levov dit «le Suédois», l’athlète fétiche de son lycée de Newark. Toujours aussi splendide, Levov l’invincible, le généreux, l’idole des années de guerre, le petit-fils d’immigrés juifs devenu un Américain plus vrai que nature.
Le Suédois a réussi sa vie, faisant prospérer la ganterie paternelle, épousant la très irlandaise Miss New Jersey 1949, régnant loin de la ville sur une vieille demeure de pierre encadrée d’érables centenaires : la pastorale américaine.
Mais la photo est incomplète, car, hors champ, il y a Merry, la fille rebelle. Et avec elle surgit dans cet enclos idyllique le spectre d’une autre Amérique, en pleine convulsion, celle des années soixante, de sainte Angela Davis, des rues de Newark à feu et à sang…
Passant de l’imprécation au lyrisme, du détail au panorama sans jamais se départir d’un fond de dérision, ce roman de Philip Roth est une somme qui, dans son ambiguïté vertigineuse, restitue l’épaisseur de la vie et les cicatrices intimes de l’Histoire.

Critique : C’est l’histoire d’un brave type  bien sous tout rapports, positif, arrangeant, dynamique,leader carismatique de son lycée et sportif adulé dans sa jeunesse, GI respecté pendant son armée puis industriel besogneux, respectable et accompli dans sa maturité, marié avec Miss New Jersey  dans sa maison dorée de la province de Newark… bref, l’icône américain par excellence propre sur lui d’une infaillible droiture et « sans histoires ».
Une fois les présentations effectuées Roth commence à creuser les failles de ce type là, et à lézarder impitoyablement tout ce bel édifice bien lisse en surface…
En second rideau, c’est encore une fois le système de valeurs américain qui est écorné à cette période de transition importante qu’a été la fin des années 60 et les 70′, avec les mouvements pour les droits sociaux, les rebellions de toute une jeunesse conte un système qui s’embourbait au Vietnam ..
Il faut louer le sens du récit de Roth, qui vous gobe littéralement et il est très dur de lâcher ce livre.
C’est un supplice que d’accompagner ce brave homme dans sa déchéance et sa détresse impuissante. Le roman atteint des paroxysmes de douleur que l’on à rarement ressenti en tant que lecteur, on en est tout retourné… l’angoisse du père vis à vis de l’enfant insurgé est définitivement insoutenable …
Un bel aperçu du monde américain à travers les yeux d’un amoureux des Etats-Unis, ce qui est rare de savourer de nos jours.

Note: 9,5/10

  • Poche: 580 pages
  • Editeur : Gallimard
  • Collection : Folio

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A l’ombre des cerisiers (4 mai 2016 )de Dörte Hansen

C’est au printemps 1945 que la petite Vera voit pour la première fois la vieille ferme perdue au cœur d’un immense verger. Sa mère et elle viennent de  traverser à pied une Allemagne en ruines.
Soixante-dix ans plus tard, Vera, qui occupe toujours la maison, voit débarquer à son tour sa nièce, Anne, en pleine rupture amoureuse, et son jeune fils Leon.
Les deux femmes, fortes têtes et solitaires, vont affronter ensemble une histoire familiale traversée de secrets et de non-dits.  Sauront-elles redonner vie à ces murs hantés par les chimères du passé ? Pour cela, il faudra d’abord apprivoiser les habitants du village qui ne manquent ni de caractère ni d’originalité…
Avec beaucoup de tendresse et un humour mordant, ce premier roman brosse le portrait de deux femmes indépendantes qui vont trouver ce qu’elles ignoraient chercher : une famille.

Critique : A l’ombre des cerisiers est un roman surprenand car ce n’est pas ce à quoi on s’attend en le lisant. Il n’est nul question de roman historique traitant de la seconde guerre mondiale, il s’agit plutôt d’un roman contemporain dans lequel on va suivre une multitude de personnages tous plus farfelus les uns que les autres. Certains un peu sauvages et rustres, comme le sont souvent les habitants de la campagne, mais néanmoins dotés pour la plupart d’un grand cœur.

Vera qui a été recueilli très jeune par Ida se familiarise peu à peu avec ce monde rural où elle s’est réfugiée avec sa mère à la fin de la guerre. Dans la maison d’Ida elle a pu grandir comme toutes les petites filles de son âge, protégée des dangers extérieurs. Bien des années plus-tard c’est ce que vient chercher également sa nièce Anne lorsqu’elle apparaît sur le pas de sa porte avec son petit garçon Léon. Ces deux femmes en mal d’amour qui semblent plus proches qu’elles en ont l’air, vont petit à petit s’apprivoiser. Vera se reconnait dans Anne et vice versa. Chacune ont fui afin de trouver un avenir meilleur et surtout une famille.

Vera est une femme qui m’a beaucoup interloqué. Elle est solitaire, garçon manqué, un peu folle, mais elle ne m’en a pas moins profondément touché, par ce qu’elle a vécu notamment à cause du comportement de sa mère, des conséquences choquantes de la guerre qu’elle a vu durant sa fuite, et la mort qu’elle a côtoyé très tôt. Je regrette d’ailleurs que l’on ai pas eu plus de détails sur ce que sa mère et elle ont vécu avant d’arriver chez Ida.
Quoi qu’il en soit on sent que c’est une femme qui a du se débrouiller seule et qui a mi sa vie personnelle entre parenthèses. Elle n’a ni mari ni enfants, alors sa rencontre avec le petit Léon va apporter un peu de bonheur dans cette maison sinistre. Il va peu à peu l’attendrir, ce qui va être aussi l’occasion pour elle de se remettre en question, de réfléchir sur les choix qu’elle a fait, et d’avoir une nouvelle vision du monde qui l’entoure.

Anne quant à elle est une jeune mère indépendante, libre qui a toujours fait ses propres choix, que se soit au niveau professionnel ou personnel. Trompée par son mari, et ayant de mauvaises relations avec sa mère, elle est décidée à prendre un nouveau départ pour elle et pour son fils, qu’elle souhaite protéger plus que tout.

A travers ses nombreux personnages Dörte Hansen nous dépeint également la vision un peu négative qu’ont les citadins de la campagne, qu’ils considèrent souvent comme sale et ennuyante. Ainsi les villageois sont de plus en plus isolés et incompris, comme Ida et ensuite Vera. C’est un roman plein de charme, sur les relations sociales et familiales, qui aborde les thèmes de la solitude ou encore du deuil. et qui nous montre avec beaucoup de justesse la vie à la campagne. Un monde un peu à part, simple mais chaleureux pour peu que l’on s’y intéresse vraiment.

Un roman un peu insolite mais plein de simplicité et de douceur, qui mêle une multitude de personnages très charismatiques dans la campagne allemande en 1945 et de nos jours. Deux portraits de femmes blessées, aux vies similaires, unies par la même détermination, celle de se reconstruire

Note : 9/10

 

  • Broché: 304 pages
  • Editeur : Kero (4 mai 2016)
  • Collection : KER.LITTERAT.ET

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