Aucune terre n’est promise de Lavie Tidhar, Errance maligne et quête de sens

Et au milieu pousse un désert

Tout est question d’équilibre. Cela pourrait être la devise de cet ouvrage qui allie un aspect hermétique mais cependant accessible grâce à une intrigue captivante, une narration atypique, une plume onirique et un tableau saisissant et actuel de notre monde.

L’ouvrage exige de la part du lecteur de se laisser embarquer dans un univers qui ne livrera pas tous ses secrets. Une volonté de la part de l’auteur de ne pas s’appesantir sur des explications pseudo-scientifiques qui pourraient se révéler fastidieuse et de rester focaliser sur sa narration. Une narration polyphonique, où les trois narrateurs principaux se croisent et s’interpellent, se tutoie sans que l’on sache s’ils s’adressent à eux-mêmes ou au lecteur. Deux choix de narration audacieux mais que l’auteur a su contrebalancer en se concentrant sur l’intrigue, qui se révèle trépidante, et le ressenti des personnages plutôt que sur les descriptions ou l’aspect scientifique de son univers.

Chercher à tout saisir de ce récit de science-fiction serait illusoire. Partez du principe que certaines choses sont réalisables dans les pages de ce livre, l’auteur nous entraîne dans un monde où tout est différent mais où, malheureusement, tout est pareil. Une fois ce postulat acquit la lecture en sera plus aisé. Cet hermétisme aurait pu, aurait dû, me rebuter, habitué que je suis à ce qu’un auteur me délivre les clefs de son univers dès les premières pages. Pourtant la plume de l’auteur a su me cueillir. Une plume légère, onirique, teinté d’un spleen irrémédiable sur la nature humaine. Une plume maligne qui parvient à maintenir l’intérêt pour la quête du personnage principal tout en imprégnant le récit d’une revendication humaniste toujours aussi nécessaire. Une plume qui ne décrit que très peu, mais fait ressentir les alternoiments des personnages. De courts paragraphes mettent l’accent sur les aberrations auxquels se confrontent les personnages, tandis que d’autres, plus introspectif, font entendre le hurlement intérieur de personnages en errance constante.

La narration resserrée et le fait que l’auteur pose rapidement les enjeux de son récit atténue cette sensation d’être baladé de monde en monde, de narrateurs en narrateurs. L’atmosphère sociale délétère et l’humanisme désespéré qui transpirent des pages de l’ouvrage ancrent le récit dans une réalité qui évoquera à tous un sujet de société brûlant. Libre à chacun de faire son avis à la lecture, celui de l’auteur est limpide mais appelle au dialogue et le propos n’est pas manichéen. Mais c’est là le seul reproche que je pourrais faire à l’auteur. On referme le livre avec un sentiment d’inachevé, l’auteur ne va pas jusqu’au bout de son propos et il en résulte fatalement une impression d’inachevé. La fin manque d’audace et paraît un peu sage lorsqu’on la compare au pirouettes narratives au début de l’ouvrage.

Un récit de science-fiction qui a le mérite de mettre en avant une anecdote historique véridique en plus d’allier une intrigue prenante et une certaine exigence narrative. Il est juste regrettable que l’auteur n’ait pas étayé son propos un peu plus afin de consolider son ouvrage déjà solide.

”Vous, les humains, lâche-t-il, non sans affection. Vous inventez de si merveilleux mensonges, vous fabulez le monde, et chaque phrase que vous prononcez est un rêve. Vous tenez tellement à être le livre du monde, les mots qui racontent son histoire. Pourtant ,au plus profond de votre cœur, vous savez n’être qu’éphémères.” tirade du sphinx (oui il y a aussi un sphinx dans ce récit)

Résumé: Berlin. Lior Tirosh, écrivain de seconde zone, embarque pour la Palestina, fuyant une existence minée d’échecs. Il espère retrouver à Ararat City la chaleur du foyer, mais rien ne se passe comme prévu : la ville est ceinturée par un mur immense, et sa nièce, Déborah, a disparu dans les camps de réfugiés africains. Traqué, soupçonné de meurtre, offert en pâture à un promoteur véreux, Lior est entraîné malgré lui dans les dédales d’une histoire qu’il contribue pourtant à écrire. Lavie Tidhar questionne nos identités, et le prix qui leur est attaché. Aucune terre n’est promise est un roman d’une incroyable lucidité sur les enjeux d’Israël, microcosme du monde. Il n’en cède pourtant rien à la poésie, seule utopie capable encore d’incarner la paix.

Test Blu-ray : Un Sac De Billes (24 mai 2017) de Christian Duguay avec Dorian Le Clech, Batyste Fleurial

Dans la France occupée, Maurice et Joseph, deux jeunes frères juifs livrés à eux-mêmes, font preuve d’une incroyable dose de malice, de courage et d’ingéniosité pour échapper à l’invasion ennemie et tenter de réunir leur famille à nouveau.

Chronique Film:  « Un Sac de Billes » tiré et adapté du best seller de Joseph Joffo paru en 1973, lui-même témoignage de son histoire vraie, démarre d’abord comme une très belle carte postale… Un peu surpris par l’aspect léger et un peu mélo de cette toile de fond, presque en décalage avec le climat anxiogène de cette époque plus que troublée, le film prend enfin et petit à petit de la densité par les événements historiques qui poussent cette famille juive à se séparer pour espérer mieux se retrouver ensuite… On quitte alors cette bienveillance feutrée, pour entrer dans le drame de l’éclatement familial avec tout ce qu’il comporte comme décisions, nouvelles règles ou habitudes et bien sûr comme dangers à venir… La caméra se focalise alors sur les deux plus petits de cette fratrie de quatre garçons, afin de suivre leur voyage jusqu’à la zone libre. Le plus jeune des deux, Joseph après un début qui faisait craindre le pire, finit par prendre une certaine épaisseur qui fait que l’on s’attache à cet enfant de mieux en mieux interprété par Dorian Le Clech, alors que son frère plus âgé (Batyste Fleurial) lui apporte toute sa protection et son amour. Certains moments sont même d’une extrême gravité et le basculement dans le néant face à la barbarie ambiante, n’est jamais loin pour ces enfants, au point de nous faire frémir d’une minute à l’autre… L’émotion est alors au cœur des faits montrés à l’écran, pour mieux nous rappeler l’horreur vécue à travers cette guerre sans nom. Les acteurs sont tous à la hauteur, de Patrick Bruel très touchant et juste au plus petit et héros de l’histoire qui ne cesse de grandir, de mûrir et de se responsabiliser ! Alors un film utile dont la reconstitution de ces années 40-45 est par ailleurs fidèle et superbement filmée. Cette deuxième adaptation, cette fois par Christian Duguay est donc malgré son aspect un peu trop beau et léché dans sa forme, à découvrir pour le fond historique tout simplement essentiel !

Note : 9,5/10

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TEST BLU-RAY :

IMAGE : Dans l’ensemble l’image est de bonne tenue avec des couleurs bien pesées et des contrastes qui donnent une véritable profondeur à l’ensemble. Les décors sont parfaitement bien travaillés pour nous plonger dans l’univers de ce périple au sein de la France . Tout est parfaitement dosé et les contrastes offrent une belle profondeur à l’ensemble. Le support donne tout son volume au film.

SON : Une piste DTS-Hd Master Audio 5.1, totalement en accord avec le film et avec ses besoins. La répartition est minutieuse, et les voix ne sont pas trop en retrait par rapport aux effets sonores qui entourent le film. La dynamique de l’ensemble permet une belle immersion surtout dans les effets sonores qui servent à créer l’ambiance plus palpable, comme dans la scène d’arrestation au sein de l’Hotel de Nice.

BONUS :  Côté Bonus, le making of est intéressant est s’intéresse surtout à l’auteur Joffo  ce qui nous permet de découvrir ses impressions de l’histoire et un autre module sur la musique qui est bien mais rapide.

« Sur les traces d’Un sac de billes » : documentaire (53′)
Making of de la musique (5′)
Bande-annonce

  • Acteurs : Dorian Le Clech, Batyste Fleurial Palmieri, Patrick Bruel, Elsa Zylberstein, Bernard Campan
  • Réalisateurs : Christian Duguay
  • Format : Couleur
  • Audio : Français (DTS-HD 2.0), Français (DTS-HD 5.1)
  • Audio description : Français
  • Sous-titres pour sourds et malentendants : Français
  • Région : Toutes les régions
  • Rapport de forme : 2.35:1
  • Nombre de disques : 1
  • Studio : Gaumont
  • Date de sortie du DVD : 24 mai 2017
  • Durée : 101 minutes

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