Une vie comme les autres de Hanya Yanagihra

Mécanique du mélodrame

Avec ce retour en demi-teinte sur un roman qui a eu un tel retentissement, je ne vais pas m’attirer que des réactions amicales mais peu importe.

Une vie comme les autres n’a donc pas été le ravissement littéraire attendu. La faute tout d’abord à la plume de l’autrice qui m’a laissé complètement froid. J’ai trouvé son style mécanique, manquant de cette grâce et ce lyrisme nécessaire lorsqu’il s’agit de conter le destin de plusieurs personnages.

Les 500 premières pages furent ainsi le témoin de mon profond ennui. Je n’ai pu m’intéresser à aucun paragraphe du récit de cette bande d’amis, jeunes adultes qui vivent leurs meilleures années à New York. J’ai trouvé les personnages transparents, à part J.B. l’artiste égocentrique et Jude bien sûr. Le reste des personnages manquent de charisme et se démarquent uniquement par sa dévotion totale envers Jude.

Ah Jude, pauvre Jude. S’il faut bien reconnaître une qualité au style de Hayanamura c’est son côté méthodique qui permet de dresser un portrait psychologique extrêmement précis de ce personnage complexe.
Sa relation sentimentale, ses démons intérieurs, ses troubles psychologiques, tout cela est détaillé de manière à se rendre compte de la difficulté, voire de l’impossibilité, à guérir de son passé.

À partir du moment où il devient le personnage principal du récit, il est bien sûr impossible de ne pas ressentir d’empathie pour lui et toutes les horreurs qu’il a subies.

Mais c’est là aussi ce que je reproche à l’autrice. Cette surenchère dans le malheur a fini par me désolidariser du sort de Jude. J’avais l’impression que l’on cherchait par tous les moyens à me tirer une larme sur la vie tragique de Jude et ce genre de stratagème fonctionne rarement sur moi.

Pourtant j’aurais vraiment voulu ressentir de l’empathie pour cette bande d’amis dévoués, j’aurais aimé être anéanti à l’évocation du passé douloureux de Jude mais à trop vouloir en faire l’autrice a fini par me lasser sans jamais parvenir à me captiver complètement.

Résumé : Ils sont quatre amis de fac, et ils ont décidé de conquérir New-York : Willem, l’acteur à la beauté ravageuse ; JB, l’artiste peintre, aussi ambitieux et talentueux qu’il peut être cruel ;Malcolm, qui attend son heure dans un prestigieux cabinet d’architectes ; Jude, le plus mystérieux d’entre eux, celui qui, au fil des années, s’affirme comme le soleil noir de leur quatuor, celui autour duquel les relations s’approfondissent et se compliquent cependant que leurs vies professionnelles et sociales prennent de l’ampleur.

Éditeur ‎Le Livre de Poche (30 octobre 2019)
Langue ‎Français
Poche ‎1128 pages
ISBN-10 ‎2253100560
ISBN-13 ‎978-2253100560

Poussière dans le vent de Leonardo Padura

Nous ne sommes que poussière

L’auteur porte dans cet ouvrage une part d’histoire, d’humanité de tout un peuple, de toute une nation, sous nos yeux c’est toute l’histoire de l’île de Cuba qui prend vie.

Le récit nous emporte dans le récit d’un clan d’amis, soudés par des liens d’amitié que ni l’oppression étatique, ni la misère endémique, ni les années d’exils ne sauraient séparer. Tout les mystères entourant le groupe, le suicide troublant du peintre maudit Walter, la disparition d’Elisa, la question de la paternité d’Adela ne sont que des prétextes pour partir à la découverte de personnages tous plus attachants les uns que les autres.

Les portraits s’enchaînent et on ne cesse d’être émerveillé par le talent de l’auteur pour donner de la voix à des personnages si charismatiques, si attachants, tout en étant si différents. Qu’ils aient fait le choix de rester à Cuba en endurant les privations et la corruption où qu’ils soient partis pour des contrées plus bienveillantes, le charme opère à chaque fois.

L’auteur dissèque la mentalité cubaine, ses charmes indéniables mais aussi ses tares. Son récit ambitieux nous amène à découvrir des portraits variés de personnages qui ont tous leur manière de voir les choses et ceux sur plusieurs générations puisque l’on suit aussi les enfants du clan, eux-mêmes porteurs d’interrogations, d’envies, d’espoir et de colères.

Cet ouvrage fabuleux est tout autant une fresque familiale que le chant d’un peuple qui n’a cessé de subir le joug communiste tout en continuant à vivre, à boire, à manger et surtout à s’aimer.

Résumé : Ils ont vingt ans. Elle arrive de New York, il vient de Cuba, ils s’aiment. Il lui montre une photo de groupe prise en 1990 dans le jardin de sa mère. Intriguée, elle va chercher à en savoir plus sur ces jeunes gens.
Ils étaient huit amis soudés depuis la fin du lycée. Certains vont disparaître, certains vont rester, certains vont partir. Des personnages magnifiques, subtils et attachants, soumis au suspense permanent qu’est la vie à Cuba et aux péripéties universelles des amitiés, des amours et des trahisons.

Éditeur ‎POINTS (13 janvier 2023)
Langue ‎Français
Poche ‎744 pages
ISBN-10 ‎2757899821
ISBN-13 ‎978-2757899823

L’enfant qui voulait disparaître de Jason Mott

Courir après sois-même

Ce roman au ton volontairement burlesque nous entraîne à la poursuite d’un narrateur, l’auteur lui-même peut-être, dans une fuite en avant qui s’apparente à une quête désespérée pour se réconcilier avec soi-même.

On fait connaissance avec notre héros, en pleine promotion de son ouvrage, L’enfant qui voulait disparaître, alors qu’il échappe aux poings d’un mari jaloux, à peine s’il a le temps de s’engouffrer dans l’ascenseur. Accessoirement il est aussi nu comme un ver. 

Le ton est donné. Il sera haut en couleur. D’un jaune solaire comme les rayons d’humour, souvent grinçant et ironique, qui illuminent l’ouvrage. D’un vert cynique lorsqu’il s’agit de dépeindre le milieu de la promotion. D’un rouge écarlate lorsque la violence du monde s’invite dans l’univers bariolé du narrateur. Et puis il y a le noir, couleur charbon, que l’on tente d’ensevelir sous la futilité d’une vie frénétique. 

Car sous les couleurs chatoyantes se cache la souillure d’une enfance brisée par le harcèlement et le racisme. Jusqu’au drame fatal, celui qui creuse un trou béant dans la poitrine d’un jeune homme qui est peut-être le narrateur, ou pas. Un trou qui avalera toutes les couleurs pour ne laisser qu’un blanc infini de douleur.

Nu dans le premier chapitre, le narrateur prend forme sous nos yeux. À mesure que son univers s’étiole sous les coups de massue de la réalité, son esprit et son corps prennent forme. Son regard s’affûte, sa conscience s’éveille. Le récit nous offre une résurrection littéraire tout en s’emparant d’un sujet qui secoue les USA. 

C’est là toute la force du récit, derrière les pirouettes narratives et les bons mots, il aborde un thème complexe qui prend peu à peu l’ascendant sur le burlesque pour livrer une tirade finale bouleversante, qui résonne comme un constat amer mais aussi une victoire personnelle.

En équilibre constant entre la satire sociale et le récit introspectif, ce roman, malicieux et espiègle, offre une réflexion bouleversante sur la difficulté à se réconcilier avec son passé pour mieux faire face au présent.  

Résumé : u cours d’une tournée promotionnelle pour son dernier roman, un écrivain noir américain fait la connaissance d’un enfant à la peau si sombre qu’on le surnomme Charbon. D’abord rencontré dans la salle à manger d’un grand hôtel, le gamin d’une dizaine d’années réapparaît à chaque étape de la tournée et raconte sa vie, ses parents et leur idée folle : le pousser à devenir invisible pour ne pas avoir à subir le destin que sa couleur de peau lui réserve.L’enfant existe-t-il vraiment ? Affecté d’un étrange mal qui l’empêche de distinguer la réalité du produit de son imagination, l’écrivain serait bien incapable de le dire. Mais réelle ou fantasmée, cette rencontre va remettre en question son rapport à sa propre histoire, à sa condition et lui faire admettre une cruelle évidence : être noir aux États-Unis signifie vivre sous une menace constante.Comédie féroce, tragédie déchirante, manifeste contre la peur, l’oppression et les violences policières, L’Enfant qui voulait disparaître est tout cela à la fois

Éditeur ‎AUTREMENT (5 janvier 2022)
Langue ‎Français
Broché ‎432 pages
ISBN-10 ‎2746763001
ISBN-13 ‎978-2746763005

Mille soleils splendides de Khaled Hosseini

l’Afghanistan à visage humain

Loin des clichés véhiculés par les médias occidentaux, Khaled Hosseini nous convie à un voyage dans un pays martyr. Une épopée dont on ne ressort pas indemne.

Le récit offre le portrait de deux femmes dans un pays saigné à blanc. Deux enfants qui vont devoir grandir trop vite, deux filles dont les parents, trop accaparés par leurs soucis d’adultes n’aiment pas suffisamment ou ne parviennent pas à protéger. Deux mères désemparées face à la cruauté du monde dans lequel elles doivent élever leurs enfants. Deux portraits poignants qui font résonner l’ouvrage d’empathie et soutiennent tout le récit.

Le récit est aussi un portrait contrasté de l’Afghanistan et de la ville de Kaboul, l’auteur n’hésite pas à mettre en avant les beautés de ce pays, l’ingérence extérieure qui entrave le développement et le patriarcat omniprésent. On découvre le quotidien des habitants dans un pays en guerre sans jamais que le récit ne s’éloigne de ses personnages.

L’auteur nous livre une épopée tragique, parfois un peu naïve mais qui touche au cœur. Le tout porté par une plume délicate et attentionnée.

Résumé : Forcée d’épouser un homme de trente ans son aîné, exécrable islamiste aux allures de Barbe Bleue, Mariam subit la colère de son époux devant son incapacité à lui donner un fils. Après dix-huit ans de soumissions à cet homme brutal, elle doit endurer une nouvelle épreuve : l’arrivée de Laila sous son propre foyer une petite voisine de 14 ans, que Rachid décide d’épouser en secondes noces. Les années passent, longues comme des veillées funèbres. Massoud assassiné. Les Talibans installés. De rivales, Mariam et Laila deviennent alliées, soeurs de malheur face au despotisme des pères, des maris et de leur cortège de lois inhumaines. Dans la prison de leur exil intérieur, elles unissent leur courage pour tenter de fuir l’Afghanistan et sa folie meurtrière, et partir au Pakistan. Mais parviendront-elles jamais à quitter cette terre dévastée, et leur ville, Kaboul, où « les soleils splendides » du passé sont aujourd’hui noyés dans des bains de sang ?

Éditeur ‎10 X 18 (8 janvier 2009)
Langue ‎Français
Poche ‎416 pages
ISBN-10 ‎2264049065
ISBN-13 ‎978-2264049063

Ligne de failles de Nancy Huston

Jusqu’à la source

Le fleuve d’une vallée ignore l’existence de la cascade qui la constitue, tout comme ladite cascade ne peut savoir qu’elle s’abreuve à une source plus lointaine. Parcourir les flots de l’histoire à contre-courant pour découvrir la source qui ruisselle sur le présent, c’est le pari osé de Nancy Huston avec ce récit ambitieux.

À travers une narration atypique l’autrice revisite l’histoire d’une famille jusqu’au drame initial, le péché originel qui a planté ses crocs dans l’ADN de cette famille, contaminant chacun de ses membres, génération après génération avec des symptômes différents mais toujours en instillant le malaise et un sentiment de rejet.

Un pari qui aurait été réussi si le secret en question avait été mieux mis en avant durant la dernière partie. L’origine de la fracture de cette lignée familiale ancrée dans l’histoire paraît trop nébuleuse pour acquérir l’ampleur nécessaire et expliquer les névroses qui rongent ses membres. Il est dommage également que l’autrice préfère expliquer un détail historique dans une note à la fin de l’ouvrage plutôt que de l’inclure dans sa narration. Cela aurait permis au récit de gagner en profondeur.

Pourtant la lecture reste agréable. Chaque narrateur possède sa propre voix, sa propre vision enfantine sur un monde d’adultes emplis de secrets et de non-dits. La plume allie rythme et une prose imagée très plaisante. Les différentes parties s’enchaînent toutes seules.

Un roman ambitieux qui manque de toucher au but par une conclusion qui manque de retentissement mais dont la narration inventive invite à la relecture.

Résumé : Entre un jeune Californien du XXIe siècle et une fillette allemande des années 1940, rien de commun si ce n’est le sang. Pourtant, de l’arrière grand-mère au petit garçon, chaque génération subit les séismes politiques ou intimes déclenchés par la génération précédente.

ASIN ‎2742769366
Éditeur ‎Babel (6 juillet 2011)
Langue ‎Français
Poche ‎496 pages
ISBN-10 ‎2351500741
ISBN-13 ‎978-2351500743

Betty de Tiffany McDaniel

La complainte des étoiles

Une famille mixte dans une Amérique rurale, une petite fille qui rêve le monde bercé par les légendes que lui invente son père. Un récit porté par une tendre brise qui peut soudainement se transformer en tempête dévastatrice.

L’amour qui unit Betty à son père s’impose comme les piliers narratifs du récit. Chaques fois que Betty se trouvera confrontée à la bêtise ou la méchanceté, son père saura rallumer la flamme dans ses yeux.

Aussi beau soit-il dans la description de cet amour filial, le récit souffre d’une stagnation narrative qui alourdit le récit et ternit le plaisir que l’on prend à suivre Betty. Certains membres de la famille de Betty ne sont guère attachants et trop présents tout au long du récit. Sans parler d’un mystère secondaire qui est étiré tout au long du récit mais dont on devine vite la résolution.

Le dernier tiers du récit m’a réconciliée avec ma lecture. Les événements n’épargnent pas la famille Carpenter. La plume de l’autrice ne nous épargne rien des malheurs de la famille sans pour autant verser dans le mélo.

On referme le livre le cœur lourd face au destin des Carpenter mais les yeux émerveillés par la candeur féerique et la ténacité de Betty.

Résumé : Ce livre est à la fois une danse, un chant et un éclat de lune, mais par-dessus tout, l’histoire qu’il raconte est, et restera à jamais, celle de la Petite Indienne. » La Petite Indienne, c’est Betty Carpenter, sixième de huit enfants. Parce que sa mère est blanche et son père cherokee, sa famille vit en marge de la société. Avec ses frères et soeurs, Betty grandit bercée par la magie immémoriale des histoires de son père, au coeur des paysages paisibles de l’Ohio. Mais les plus noirs secrets de la famille se dévoilent peu à peu. Pour affronter le monde des adultes, Betty découvrira le pouvoir réparateur des mots

Éditeur ‎GALLMEISTER (3 mars 2022)
Langue ‎Français
Poche ‎704 pages
ISBN-10 ‎2351788389
ISBN-13 ‎978-2351788387

American war d’Omar El Akkad

Miss American rage

Une Amérique divisée, une guerre qui ne laisse aucun répit aux civils, deux conceptions du monde qui s’affrontent sur fond de fin de règne, un univers dystopique trop semblable au nôtre. Autant de matière qui aurait dû donner une lecture réjouissante, est-ce vraiment le cas ?

L’auteur bâtit son univers patiemment, pages après pages, livrant moult détails et descriptions sur ces États-Unis fracturés dont les enfants sont fauchés par un tir de missile lancé par un drone. Lentement c’est un pays ravagé qui prend forme sous nos yeux.

Narré sous forme de journal intime, qui use des effets de prolepse, créant ainsi une attente de la part du lecteur. Le monde impitoyable dans lequel évolue la petite Sarah se révèle consistant. On foule la terre aride du Mississippi avec Sarah et sa famille, on partage leur détresse et leur désespoir. Cette narration immersive est une réussite totale et représente l’atout majeur de l’ouvrage.

Les chapitres nous montrant l’intrépide Sarah grandir dans le camp de réfugiés de Patience sont les meilleurs passages du livre. Sarah ne sera jamais aussi attachante que lorsqu’elle déambule entre les ruelles créées par les tentes de réfugiés et qu’elle tente d’apprivoiser un monde hostile. Par la suite cela se gâte.

Car à trop vouloir conter la naissance d’une guerrière, l’auteur oublie d’accorder une certaine profondeur à son récit. Montrer le quotidien d’un soldat dévoué à sa cause c’est bien, expliquer la création d’une chaîne de haine irrépressible c’est une volonté honnête mais cela ne suffit pas à porter le récit sur 500 pages. 

Il manque à l’ouvrage une réflexion sur la mentalité sudiste dont découle un tel fanatisme et une si grande fierté. En l’état, American war est une fresque guerrière convaincante mais qui manque de profondeur pour être vraiment marquante. 

Résumé : États-Unis, 2074. Une nouvelle guerre de Sécession éclate entre le Nord et le Sud, sur fond de contrôle des énergies fossiles. Lorsque son père est tué, la jeune Sarat Chestnut et sa famille n’ont d’autre choix que de fuir dans un camp de réfugiés en zone neutre.Entre les privations, les désillusions et les rencontres hasardeuses, la fillette influençable va, au fil des ans, se transformer en une héroïne implacable appelée à jouer un rôle déterminant dans le nouvel ordre mondial.

Éditeur ‎J’AI LU (6 octobre 2021)
Langue ‎Français
Poche ‎512 pages
ISBN-10 ‎2290233021
ISBN-13 ‎978-2290233023

Cadavre exquis de Agustina Bazterrica

Bien saignant le steak s’il vous plaît

Dans un monde où la notion même d’être humain est remise en cause comment conserver une part d’humanité ? Comment ne pas s’avilir et devenir un robot à visage humain ? Comment garder foi en l’avenir ? Le roman d’ Agustina Bazterrica apporte une certaine forme de réponse mais pas forcément celle que l’on attendait.

Lorsque le récit commence, le narrateur, Marcos est un chêne malade. Ses racines se meurent lentement dans une institution pour personnes dépendantes, ses jeunes branches sont mortes et son écorce se dépérit morceaux après morceaux sous les coups d’une vie d’automate au service d’une société qui a érigé la cruauté en institution.

La plume de l’autrice est telle une lame de couteau, froide et métallique. Ses mots d’un ton glacial et clinique tranchent notre imaginaire de lecteur, y laissant des plaies béantes où macère l’horreur banale d’un monde sans âme ni conscience.

Le regard exsangue de Marcos nous invite dans un banquet des horreurs pour tenter de comprendre comment une société s’est livrée d’elle-même à un système digne de 1984. Une galerie des horreurs qui sculpte en contrejour le portrait d’un homme tellement meurtri qu’il ne se voit même plus saigner.

Mais tout arbre peut guérir et, suite à une arrivée inattendue, Marcos va retrouver la force de désiré, d’aimer, d’espérer, de se rebeller face à une société qu’il vomit de tout son être. C’est là tout l’intérêt du roman, sans jamais se départir de ce détachement clinique, on assiste à la renaissance d’un homme. Un retour à la vie dans un monde de carcasses sur deux jambes.

Puis survient la fin, un dénouement brutal qui rappelle que l’on a beau ignorer les coups de couteau que l’on nous inflige, ceux-ci laissent toujours une blessure profonde au creux de l’âme, qui ne peut pas toujours se cicatriser.

Résumé : Un virus a fait disparaître la quasi-totalité des animaux de la surface de la Terre. Pour pallier la pénurie de viande, des scientifiques ont créé une nouvelle race, à partir de génomes humains, qui servira de bétail pour la consommation.Ce roman est l’histoire d’un homme qui travaille dans un abattoir et ressent un beau jour un trouble pour une femelle de « première génération ». Or, tout contact inapproprié avec ce qui est considéré comme un animal d’élevage est passible de la peine de mort. À l’insu de tous, il va peu à peu la traiter comme un être humain. Le tour de force d’Agustina Bazterrica est de nous faire accepter ce postulat de départ en nous précipitant dans un suspense insoutenable. Roman d’une brûlante actualité, tout à la fois allégorique et réaliste, Cadavre exquis utilise tous les ressorts de la fiction pour venir bouleverser notre conception des relations humaines et animales.

Quatrième de couverture
Un virus a fait disparaître la quasi-totalité des animaux de la surface de la Terre. Pour pallier la pénurie de viande, des scientifiques ont créé une nouvelle race, à partir de génomes humains, qui servira de bétail pour la consommation.Ce roman est l’histoire d’un homme qui travaille dans un abattoir et ressent un beau jour un trouble pour une femelle de « première génération ». Or, tout contact inapproprié avec ce qui est considéré comme un animal d’élevage est passible de la peine de mort. À l’insu de tous, il va peu à peu la traiter comme un être humain. Le tour de force d’Agustina Bazterrica est de nous faire accepter ce postulat de départ en nous précipitant dans un suspense insoutenable. Roman d’une brûlante actualité, tout à la fois allégorique et réaliste, Cadavre exquis utilise tous les ressorts de la fiction pour venir bouleverser notre conception des relations humaines et animales.

Biographie de l’auteur
Agustina Bazterrica est née à Buenos Aires en 1974. Cadavre exquis, son premier roman, a remporté le prestigieux prix Clarín en 2017.

Éditeur ‎FLAMMARION (21 août 2019)
Langue ‎Français
Broché ‎304 pages
ISBN-10 ‎2081478390
ISBN-13 ‎978-2081478398

A star is bored de Byron Lane

Une saison en enfer

Sur le thème éculé de la rencontre de deux solitaires évoluant dans des sphères différentes, Byron Lane aurait pu écrire un récit corrosif sur l’aspect néfaste de la célébrité malheureusement à trop vouloir décrire le quotidien d’un assistant sans creuser son sujet il a loupé l’occasion.

Pourtant il y avait largement de quoi faire avec les personnages de Charlie d’un côté, pigiste paumé et peu sûr de lui qui étouffe dans Los Angeles et sa course à la réussite, et Kathi Kannon de l’autre, une actrice sur le retour qui vit sur sa renommée et qui souffre de légers troubles mentaux.

Ces deux êtres fracassés vont se trouver, s’apprivoiser, se compléter. La relation interdépendante entre les deux personnages est touchante et offre les meilleurs passages du récit, notamment une scène hilarante dans un restaurant japonais. 

Les relations toxiques avec leurs parents, le père pour Charlie et la mère pour Kathi, offrent également un aperçu de ce que le l’ouvrage aurait pu offrir. Durant ces passages les personnages se retrouvent dénudés et démunis face à la figure imposante de leur géniteur, l’empathie pour les personnages est totale.

Malheureusement de ce terreau psychologique l’auteur n’en fera rien, préférant aligner les scènes de comportement absurde de Kathi, ses crises maniaques, sa consommation de substances qu’elles avale comme si c’était des pastilles pour la gorge. Un long naufrage auquel assiste impuissant Charlie dans un récit qui tourne très vite en rond, aussi inspiré du réel soit-il.

La lecture s’en trouve donc mitigée, l’envers du décor hollywoodien ne se révèle pas suffisamment passionnant pour porter le récit tout comme le personnage de Kathi dont on ne fait que gratter la surface sans jamais explorer ce qui se cache derrière ses addictions et son mal-être.   

Résumé : Tous les matins, vous devez aller dans sa chambre, la réveiller doucement, lui donner ses pilules pour la journée bien gentiment, et vous assurer qu’elles ne vont pas la tuer.

Au petit déjeuner, Kathi prend un sachet de céréales amaigrissantes. Sans lait. Vous devez aussi lui apporter un verre rempli de glaçons avec une canette de Coca Zéro. Vous versez le Coca sur les glaçons pendant que vous êtes dans la chambre de façon à ce qu’elle entende le bruit des glaçons qui craquent. Ça va lui donner envie de boire et l’aider à se réveiller.

Éditeur ‎Michel Lafon (10 novembre 2021)
Langue ‎Français
Broché ‎352 pages
ISBN-10 ‎2749945348
ISBN-13 ‎978-2749945347

Tant qu’il y aura des cèdres de Pierre Jarawan, Papaoutai

Un premier roman ambitieux. Une quête des origines sur fond de tensions politiques, un personnage principal en perte de repères. Le tout forme un récit très agréable à lire mais avec des petits défauts.

Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’une première œuvre. J’ai donc pardonné à l’auteur sa plume timide et sa narration un peu scolaire. Le style est très agréable à lire mais on sent que l’auteur n’a pas encore montré tout ce qu’il pouvait faire. Il a également tendance à étaler des éléments historiques concernant le Liban sans qu’il y est forcément de rapport avec l’intrigue, donnant un côté dissertation très appliqué à l’ensemble.

Le portrait du personnage principal sauve le récit de ces petites imperfections. Passé une première partie tout en douceur et nostalgie, survient le temps troublé qui fait suite à cette disparition paternelle inexpliquée dans une seconde partie à double temporalité.

Suivre l’évolution psychologique de Samir entre son adolescence colérique et rageuse et le jeune adulte en quête de réponse mais qui cherche aussi à se pardonner à lui-même était très agréable à la lecture. J’aurais aimé que l’auteur insiste sur le dépaysement d’un immigré de retour dans son pays d’origine mais le récit est déjà suffisamment dense comme ceci.

Malheureusement la troisième et dernière partie vient gâcher l’appréciation générale. Le rythme s’emballe, l’intrigue prend un tournant que j’ai jugé dispensable et pas assez approfondie. Les réponses tant attendues surviennent de manière précipitée et le final paraît confus et insatisfaisant.

Malgré cette conclusion en demi-teinte, Tant qu’il y aura des cèdres reste une lecture agréable avec un excellent portrait d’un jeune homme en perte de repères.  

Résumé : Après avoir fui le Liban, les parents de Samir se réfugient en Allemagne où ils fondent un foyer soudé autour de la personnalité solaire de Brahim, le père. Des années plus tard, ce dernier disparaît sans explications, pulvérisant leur bonheur. Samir a huit ans et cet abandon ouvre un gouffre qu’il ne parvient plus à refermer. Pour sortir de l’impasse, il n’a d’autre choix que de se lancer sur la piste du fantôme et se rend à Beyrouth, berceau des contes de son enfance, afin d’y dénicher les indices disséminés à l’ombre des cèdres.
Voyage initiatique palpitant, Tant qu’il y aura des cèdres révèle la beauté d’un pays qu’aucune cicatrice ne peut altérer. À travers cette quête éperdue de vérité se dessine le portrait d’une famille d’exilés déchirée entre secret et remords, fête et nostalgie.

Éditeur ‎Le Livre de Poche (10 mars 2021)
Langue ‎Français
Poche ‎576 pages
ISBN-10 ‎2253077755
ISBN-13 ‎978-2253077756