Trop de morts au pays des merveilles de Morgan Audic

Résumé: Depuis trois ans Alice, la femme de Christian Andersen, avocat au barreau de Paris, a disparu. Et depuis trois ans, les gens qui l’entourent se posent la même question : Andersen a-t-il tué sa femme ? Andersen rendu amnésique par un grave accident quelques jours après qu’Alice a disparu et qui cherche en vain à retrouver la mémoire. Andersen qui reçoit des sms énigmatiques, en forme de questions cryptées. Andersen, le mari inconsolable qui emploie un détective pour retrouver sa femme, si belle, si blonde, si étrangement semblable aux victimes du désormais célèbre Marionnettiste, le tueur aux rituels macabres que la brigade criminelle traque en vain depuis des mois et qui tue, justement, à nouveau. De quoi remettre en selle l’ex-lieutenant Diane Kellerman, révoquée pour violence et prête à péter de nouveau les plombs.

Chronique : J’avais chroniqué il y a quelques mois le second roman de Morgan Audic, ayant gardé un excellent souvenir de ma lecture l’auteur a tout simplement rejoint la liste des auteurs dont je surveille les nouvelles parutions. Cependant son premier ouvrage m’était encore inconnu, il était temps de combler cette lacune.

Avec son écriture rythmée et son héros persuadé qu’il n’a plus rien à perdre on retrouve les ingrédients qui vont faire le succès des polars de Morgan Audic. On ne s’ennuie jamais au cours de la lecture mêlant quête personnelle, amnésie, tueurs en série, enquête policière et personne disparue. Surtout que ces éléments ne concernent qu’une partie des thèmes brassés par l’auteur. Une multitude de sujets qui force l’auteur à survolé certains d’entre eux sans les approfondir. Le rythme effréné de l’intrigue n’invite pas à la réflexion et passe à côté d’un certain potentiel psychologique qui aurait mérité d’être développé. À l’image du lapin blanc de Lewis Caroll qui ne s’arrête jamais, le récit est toujours en mouvement.

Pour ce premier ouvrage l’auteur a voulu se montrer ambitieux avec une intrigue complexe, avec une trame temporelle allongée, et qui rappellera à certains l’intrigue de « Ne le dis à personne » d’Harlan Coben dont Guillaume Canet avait tiré un film en 2006. L’auteur tente d’apporter sa patte personnelle à travers la référence appuyée à Lewis Caroll et son ouvrage phare « Alice aux pays des merveilles » mais l’ensemble reste superflu et ne sert pas vraiment le récit mis à part dans une scène d’hallucination plutôt bien trouvée même si l’auteur en profite pour divulguer des révélations de manière trop évidente.

En ce qui concerne les personnages, l’auteur s’en sort mieux en décrivant un mari au bord du désespoir que lorsqu’il cherche à écrire une femme flic en rupture de ban. En effet Diane est en personnage beaucoup trop dans l’excès et qui s’inscrit dans la triste lignée des personnages féminins écrits de manière badass juste pour être badass. La révélation sur son passé arrive trop tardivement pour pouvoir lui donner une quelconque profondeur.

Une fin qui apporte beaucoup de réponses mais n’évite pas les incohérences inhérentes à ce genre d’histoire avec pléthores de personnages et une temporalité assez longue.

Un premier roman honnête, plein d’action et de suspens, mais dont les failles sont très vite apparentes. Failles, qu’heureusement, l’auteur a su combler avec son deuxième roman beaucoup plus maîtrisé.

Note: 6/10

  • Broché : 357 pages
  • Editeur : Editions du Rouergue (6 avril 2016)
  • Collection : Rouergue noir
  • Langue : Français
  • ISBN-10 : 2812610409

De bonnes raisons de mourir de Morgan Audic (2 mai 2019)

Résumé : Un cadavre atrocement mutilé suspendu à la façade d’un bâtiment. Une ancienne ville soviétique envoûtante et terrifiante. Deux enquêteurs, aux motivations divergentes, face à un tueur fou qui signe ses crimes d’une hirondelle empaillée. Et l’ombre d’un double meurtre perpétré en 1986, la nuit où la centrale de Tchernobyl a explosé…Morgan Audic signe un thriller époustouflant dans une Ukraine disloquée où se mêlent conflits armés, effondrement économique et revendications écologiques.

Lien Amazon : https://www.amazon.fr/dp/2226441425/ref=cm_sw_r_cp_awdb_c_zi6aEb2962V15

Chronique : Comme il est bon de finir l’année sur un excellent polar. J’ai l’impression de l’avoir attendu toute l’année celui-ci. Il réunit tous les ingrédients que j’affectionne particulièrement dans mes lectures polars, atmosphère, intrigue et personnages.

Commençons par ces derniers, aucun ne brille par son originalité mais le personnage du capitaine Joseph Melnyk, le milicien qui a roulé sa bosse, qui croit en sa mission de maintien de l’ordre malgré le regard désabusé qu’il porte sur la société ukrainienne est crédible et solide. Il sera notre porte d’entrée dans la découverte d’un pays qui ne s’est toujours pas remis de la tragédie de Tchernobyl et qui traverse aujourd’hui une guerre civile qui saigne à blanc sa jeunesse. Le second personnage, l’enquêteur Alexandre Rybelko, est emprunté à la figure du flic alcoolique, dur à cuire, dont les espoirs d’une vie meilleure ont depuis longtemps fondu comme neige au soleil. Là encore l’écriture du personnage fait mouche, l’auteur donne en quelques pages une profondeur à ce flic torturé que la vie n’épargne pas. Les autres membres du casting sont à l’avenant que ce soit Galina Novak, la bleue qui veut faire ses preuves, ou Ninel, la militante écologiste qui ne s’en laisse pas conter.

L’atmosphère maintenant, il ne suffit pas de situer l’intrigue de son polar dans la région irradié pour donner une densité particulière à l’œuvre. Non l’auteur a brodé autour de la tragédie initiale pour nous conter trois décennies de malversations politiques, de misères humaines et de désastres sanitaires. L’auteur distille les anecdotes concernant la catastrophe et ses conséquences de manière savante, nous rappelant tout au long des quatre cents pages de l’œuvre que rien n’est réglé plus de trente ans après. Grâce à son style visuel les paysages désolés de la région prennent vie contribuant à apporté une ambiance macabre et désespérée.

Terminons par l’intrigue. Les deux enquêtes parallèles s’entremêlent sans se marcher dessus et délivrent petit à petit les éléments qui vont mener à la résolution. Tout cela serait déjà satisfaisant pour tous amateurs de polars mais l’auteur se permet en plus un twist final relié de manière indirect à l’enquête. Je soupçonne l’auteur d’avoir semé sciemment des petits cailloux afin d’envoyer les lecteurs les plus perspicaces dans une direction, persuadé qu’ils seront d’avoir deviné les derniers indices, avant de les propulsé dans une direction innatendue qui finit de placer ce roman dans le top des meilleurs que je n’ai jamais lu.

Voilà un auteur qu’il va falloir suivre de près, surtout s’il continue à écrire des histoires aussi dense et adictives.

Note : 10/10

Éditeur Albin Michel
Date de publication 2 mai 2019
Langue Français
Longueur du livre 496
ISBN-10 2226441425