Au revoir là-haut de Pierre Lemaitre, les enfants meurtris de la patrie

Il était plus que temps que je parte à la découverte de Pierre Lemaitre, auteur reconnu et maintes fois primé mais que je n’avais encore jamais lu.

L’auteur adopte un ton ironique pour narrer son histoire. Ce qui constituera sa plus grande force mais aussi sa plus grande faiblesse. Le début du récit nous montre l’enfer des tranchées par le regard naïf du soldat Maillard tout en brisant le quatrième mur. Une technique qui permet d’instaurer une certaine distance ironique avec la situation vécue par les personnages. Une distance qui se rompt brutalement lorsque la réalité de la guerre se rappelle aux yeux du lecteur.

Cette plume empreinte d’humour et de légèreté va progressivement se laisser envahir par un ton désabusé à mesure que le récit dévoile toute l’ampleur de la médiocrité française, sans jamais toutefois se départir de son ton naïf, notamment grâce au personnage d’Albert, éternel grand enfant perdu dans un monde d’adultes cyniques.

Pourtant cette plume, si elle permet au récit d’être porté par une cadence plaisante qui fait que le récit se dévore tout seul, limite aussi l’ouvrage dans sa portée dramatique. Jamais je n’ai tremblé pour les personnages tant la narration semblait prévisible. De plus la caractérisation des personnages se contente d’image d’Épinal pour construire ses personnages ce qui est dommage.

Ainsi les personnages ne s’extraient jamais du carcan dans lequel l’auteur les a enfermés. Il en résulte un manque de nuances et de profondeur qui devient lassant.

Cela n’empêche pas l’ouvrage d’être un récit extrêmement agréable à lire. Pour ma prochaine lecture de cet auteur je vais peut-être être me diriger vers l’un de ses romans policiers pour saisir toute l’ampleur de sa plume.

Résumé : Ils ont miraculeusement survécu au carnage de la Grande Guerre, aux horreurs des tranchées. Albert, un employé modeste qui a tout perdu, et Edouard, un artiste flamboyant devenu une « gueule cassée », comprennent vite pourtant que leur pays ne veut plus d’eux. Désarmés, condamnés à l’exclusion, mais refusant de céder au découragement et à l’amertume, les deux hommes que le destin a réunis imaginent alors une escroquerie d’une audace inouïe…

Éditeur ‎Le Livre de Poche (22 avril 2015)
Langue ‎Français
Poche ‎624 pages
ISBN-10 ‎2253194611
ISBN-13 ‎978-2253194613

Tout les hommes n’habitent pas le monde de la même façon de Jean-Paul Dubois, un style concis au service d’un destin tragique

Jean-Paul Dubois restait pour moi un auteur inconnu, j’avais entendu parler de certaines de ces oeuvres tel que Kennedy et moi, Vous plaisantez monsieur Tanner ou encore Une vie française mais sans jamais franchir le pas. Alors lorsque l’occasion s’est présentée je me suis dis que tant qu’à découvrir un auteur aussi prolifique autant commencer par son dernier ouvrage en date.

En refermant la dernière page l’impression qu’il m’en est resté est que l’auteur maîtrise sa narration à la perfection. Faire tenir les mémoires d’un homme en moins de 300 pages n’est pas donné à la première plume venue. Là où d’autres auteurs auraient eu besoin du double de page pour conter les malheurs de Paul Hansen, Jean-Paul Dubois parvient à tracer un chemin de vie en allant à l’essentiel.

Le récit se partage entre les souvenirs de Paul et sa vie actuelle au pénitencier de Bordeaux, dans la province de Montréal. Ses chroniques de prisonniers sont les plus accessibles car elles recèlent un humour burlesque incarné par son compagnon de cellule Horton, un Hell’s Angel accusé de meurtre qui a la phobie des rongeurs et des coiffeurs. Ses élucubrations apportent une respiration dans un récit qui possède par ailleurs une grande part de mélancolie.

Il faut dire qu’entre le couple improbable formé par ses parents, les déménagements, l’industrie minière et l’amiante ce pauvre Paul Hansen n’a pas eu une vie facile. Sa capacité à assimiler les drames de son existence et à les digérer est impressionnante. Une résilience qui fait de lui le témoin idéal d’une époque en plein changement.

Le style concis et précis de l’auteur lui permet d’intégrer de nombreux personnages secondaires sans surcharger son récit. On fait ainsi la connaissance de ses parents, de sa femme Winona, son voisin et ami Kieran Read ou encore l’ignoble Sedgwick. Sous sa plume c’est un destin tragiquement banal qui prend forme, celui d’un homme ballotté par la vie et qui atteint son point de rupture alors que la vie vient de lui infliger une nouvelle et tragique épreuve.

Cet ouvrage qui a remporté le prix Goncourt en 2019 est le premier mais sans doute pas le dernier signé par cet auteur dans lequel je me plongerais.

Résumé: Cela fait deux ans que Paul Hansen purge sa peine dans la prison provinciale de Montréal. Il y partage une cellule avec Horton, un Hells Angel incarcéré pour meurtre.
Retour en arrière: Hansen est superintendant a L’Excelsior, une résidence où il déploie ses talents de concierge, de gardien, de factotum, et – plus encore – de réparateur des âmes et consolateur des affligés. Lorsqu’il n’est pas occupé à venir en aide aux habitants de L’Excelsior ou à entretenir les bâtiments, il rejoint Winona, sa compagne. Aux commandes de son aéroplane, elle l’emmène en plein ciel, au-dessus des nuages. Mais bientôt tout change. Un nouveau gérant arrive à L’Excelsior, des conflits éclatent. Et l’inévitable se produit.
Une église ensablée dans les dunes d’une plage, une mine d’amiante à ciel ouvert, les méandres d’un fleuve couleur argent, les ondes sonores d’un orgue composent les paysages variés où se déroule ce roman.
Histoire d’une vie, Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon est l’un des plus beaux livres de Jean-Paul Dubois. On y découvre un écrivain qu’animent le sens aigu de la fraternité et un sentiment de révolte à l’égard de toutes les formes d’injustice.

  • Broché : 256 pages
  • Editeur : L’Olivier; Édition : 01 (14 août 2019)
  • Collection : Littérature Française
  • Langue : Français
  • ISBN-10 : 2823615164