La stratégie des as de Damien Snyers

Pour vivre, certains choisissent la facilité. Un boulot peinard, un quotidien pépère. Humains, elfes, demis… Tous les mêmes. Mais très peu pour moi. Alors quand on m’a proposé ce contrat juteux, je n’avais aucune raison de refuser. Même si je me doutais que ce n’était pas qu’une simple pierre précieuse à dérober. Même si le montant de la récompense était plus que louche. Même si le bracelet qu’on m’a gentiment offert de force risque bien de m’éparpiller dans toute la ville. Comme un bleu, j’ai sauté à pieds joints dans le piège. L’amour du risque, je vous dis. Enfin… c’est pas tout ça, mais j’ai une vie à sauver. La mienne

Critique: Avant de faire la chronique de ce livre il faut salué la superbe couverture de Dogan Oztel.
L’histoire de ce roman est assez courte, elle est racontée à la première personne par James  qui nous donne un récit sans temps mort et focalisé sur l’action. L’univers, mélange de Fantasy et de Steampunk, se qui ce révèle intéressant à découvrir et donne envie d’en apprendre plus, même si on lui reproche un petit manque de densité. Les personnages proposés sont attachants mais l’auteur n’hésite pas à leur faire subir des horreurs.Loin d’être lisses, les héros sont pleins d’aspérités et offrent des personnages consistants et fouillés. On à l’impression de remettre les pieds dans un Paris  différant mais bien influencé.
L’écriture de l’auteur est très bonne, on est dans du turn over  où Damien Snyers emploi le flashback assez souvent  en parlant par exemple, d’une situation hasardeuse et en remontant le temps pour expliquer comment les personnages en sont arrivés là. Ici, le procédé est surtout pratique dans le récit pour donner l’envie d’en savoir plus.

Un très bon premier roman qui propose une belle galerie de personnages, une  belle intrigue et une ambiance incroyable.

Note: 8,5/10

 

  • Broché: 328 pages
  • Editeur : ACTUSF (4 février 2016)
  • Collection : Les trois souhaits

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Le cycle de Lanmeur (Tome 3-Les rêveurs de l’Irgendwo) de Christian Léourier

De partout des vaisseaux convergent vers Lanmeur. Si cet afflux est encore contenu dans le territoire contrôlé de l’Enclave, les Mondes Rassemblés ne tarderont plus à contester sa suprématie. C’est dans ce contexte de crise historique que Persval ap Galad est envoyé à la rencontre d’un énigmatique artefact qui erre dans l’espace : dans ses entrailles repose peut-être l’explication de cet univers peuplé d’humanités que Lanmeur réunit depuis des siècles, comme les pièces égarées d’un même puzzle. Un univers dont les lois semblent se modifier avec le temps. Voici le troisième tome de l’intégrale des romans et nouvelles constituant Le cycle de Lanmeur, pièce maîtresse de l’œuvre de Christian Léourier et véritable classique de la science-fiction française. Il comprend, notamment, deux nouvelles inédites. La réédition du cycle a été couronnée par le prix spécial du Grand Prix de l’Imaginaire en 2013.

Critique:

Les Masques du Réel : Ce premier texte va ainsi nous plonger, pour la première fois dans ce cycle, à la découverte de Lanmeur, la planète à l’origine du Rassemblement et de tout ce qui en découle. D’ailleurs on y découvre un Lanmeur en proie à de nombreux soucis, du fait de l’arrivée de plus en plus massives des étrangers rassemblés, voir même parfois on va dire « colonisés » comme on l’a vu dans les précédents tomes, ce qui crée ainsi de plus en plus de tensions et de discriminations. On va alors suivre Persval ap Galad, qui va être envoyé en mission par la Thoreïde pour essayer de lever le mystère d’un vaisseau qui apparait et disparait mystérieusement et qui pourrait se révéler d’une grande importance.

On quitte ainsi le Planète Opera pour se retrouver plus dans un Space-Opera que j’ai trouvé vraiment réussi et entrainant, nous offrant une intrigue qui va se révéler beaucoup plus complexe que le laissait présager les premières pages, avec son jeu de pouvoirs et de manipulations, où finalement chaque chapitre va apporter une pièce supplémentaire au puzzle qui se dessine, se révélant même un point crucial pour l’avenir du Rassemblement. Car oui cette découverte pourrait remettre en cause énormément de choses, principalement d’un point de vue politique. Ce récit se révèle d’ailleurs une pièce importante du cycle puisqu’on en apprend plus sur la politique de Lanmeur et ses convictions, mais aussi on constate un début de fragilité et de remise en cause qui soulève de nombreuses questions. Le rassemblement montre aussi ici ses limites, outre le fait qu’il s’agit plus d’une assimilation et d’une uniformisation, on se rend ici compte que ce projet amène de nombreuses difficultés, des rejets, de nombreuses réflexions aussi et surtout risque de se retourner contre ceux qui l’ont initié. Mais surtout il continue à poser cette question, comment espérer rassembler, voir faire coexister de nombreux peuples similaires et pourtant dans le fond si différent.

L’univers gagne toujours au fil des histoires en profondeur, ici par deux points que j’ai trouvé vraiment intéressants. Le premier vient de la découverte de la planète de Lanmeur, monde à la technologie extrêmement avancé et qui possède aussi une certaine poésie et une certaine beauté qui s’en dégage malgré une certaine froideur. L’autre point vient justement de l’aspect Space-Opera, qui permet ainsi de découvrir plusieurs planètes, mais aussi d’en apprendre un peu plus sur l’Espace qui entoure cet univers et les façon de se déplacer et de communiquer des uns et des autres. Ajouter à cela un travail sur les personnages et leurs relations que j’ai trouvé vraiment réussi, accrocheur bien porté par Persval, à la fois curieux, intelligent, mais qui pourtant selon Lanmeur se révèle « incomplet » du fait qu’il n’ait terminé aucune formation. Mon seul petit regret vient d’une fin que j’ai trouvé précipité et certains passages un peu classiques et prévisibles, mais franchement rien de vraiment gênant tant l’ensemble m’a fait passer un très bon moment de lecture offrant au lecteur de nombreuses surprises.

La Terre de Promesse : Ce texte va nous amener bien des années après Les Masques du Réel, la politique Lanmeurienne a fortement changé, obligé d’intégrer les peuples Rassemblés, elle a connu de nombreux bouleversements parfois destructifs, en tout cas pas toujours bénéfiques. Sauf que voilà le réseau de communication entres les planètes vient de s’éteindre sans raison. Gald l’annaliste va alors entamer un long voyage dans le monde virtuel d’Irgendwo pour essayer de comprendre cette disparition. On change de nouveau complètement de genre, puisqu’on se retrouve plonger ici dans un roman, certes de nouveau space-opera, mais que j’ai trouvé plus métaphysique dans sa façon d’appréhender l’intrigue et de pousser le lecteur à réfléchir.

L’importance du roman ne vient, ainsi, pas tant de la réponse à cette subite panne de communication, mais plus par le voyage et les réflexions que vont soulever les nombreuses aventures et les nombreuses rencontres que va faire Gald le héros principal, qui va alors découvrir un univers de rêveurs qui devaient être parfaits mais qui ne le sont pas, où finalement la guerre et la destruction sont toujours présentes et où l’utopie est bien loin. On se retrouve aussi à se poser énormément de questions sur la réalité, le virtuel, développant un aspect philosophique sur notre existence, où somme-nous finalement le fruit d’une imagination, ce qui apporte ainsi une dose philosophique que j’ai trouvé vraiment fascinante. Surtout que l’auteur reste concis, précis et clair, il ne plonge jamais vraiment dans des explications trop complexes ou ennuyeuses, le tout bien porté par une plume toujours aussi soignée et efficace.

Cela n’empêche pas non plus à l’auteur de nous faire voyager, de nous faire découvrir de nouveaux mondes, à la fois hostiles, passionnants à découvrir, avec leurs us et leurs coutumes parfois étranges, mais qui donnent en tout cas envie d’en apprendre plus. Les personnages m’ont paru peut-être un peu moins profonds et denses que les autres histoires du cycle, ou en tout cas tout du moins plus présents pour faire évoluer l’intrigue, mais cela ne les empêche pas de se révéler intéressant à découvrir et à partager leurs aventures qui ne manquent pas non plus d’action et de rebondissements. Mon seul regret vient de quelques longueurs que se ressentent par moment dans l’histoire, un peu comme si l’auteur ralentissait un chouïa trop son histoire pour ne pas offrir sa conclusion trop rapidement.

De nouveau Christian Léourier propose deux récits qui se révèlent riches, que ce soit aussi bien en réflexions, en personnages ou encore en décors que l’on découvre au fil des pages. Le cycle continue à se densifier pour aboutir à ce dernier texte de cette troisième intégrale qui offre une conclusion ouverte à la fois fascinante, déroutantes et intelligente j’ai trouvé. On continue ainsi à se poser des questions sur l’identité, l’existence ou encore la réalité, le tout toujours porté par une plume fluide, soignée et poétique qui happe très rapidement le lecteur pour ne plus vraiment le lâcher.  Il ne me reste plus qu’à me lancer prochainement dans la quatrième intégrale qui lui reviendra sur les origines du rassemblement.

En Résumé : J’ai passé un très bon moment de lecture avec cette troisième intégrale du cycle de Lanmeur qui, à travers deux textes, vient nous en dévoiler plus sur la planète de Lanmeur ainsi que cette idéologie du Rassemblement. L’auteur nous propose ainsi deux intrigues différentes mais pourtant que j’ai trouvé réussies, efficaces et entrainantes, proposant aussi au lecteur de nombreuses réflexions, qu’elle soit métaphysique ou plus contemporaine. Comme souvent on rencontre aussi des planètes et des lieux qui ne manquent pas d’attraits et donnent envie d’en apprendre plus que ce soit aussi bien d’un point de vue social que par des descriptions de planète, magnifique, hostiles et attirantes. Les personnages sont toujours aussi soignés, accrocheurs et denses, malgré peut-être un léger manque de profondeurs sur certains dans le second texte. Au final je regretterai juste pour le premier texte une conclusion un peu rapide et quelques éléments trop prévisibles et pour le second quelques longueurs, mais franchement rien de non plus bloquant tant je me suis retrouvé emporter par ces histoire, bien portés par une plume toujours aussi soignée, fluide et captivante.

Note 7/10

 

  • Poche: 544 pages
  • Editeur : Folio (29 mai 2015)
  • Collection : Folio SF

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Anges de fer, paradis d’acier de Serge Brussolo

Quelques années après son expédition sur Ozataxa, planète perdue au-delà de la frontière barbare, David Sarella est désormais au service du clone du pape Nothanos III. Ce dernier lui confie une mission secrète : à la tête de quelques soldats d’exception, il devra libérer des entités divines et les déposer sur Almoha, une planète sauvage et inhabitable, afin qu’elles la terraforment et en fassent un sanctuaire pour Nothanos III et ses fidèles. Mais se faire obéir de dieux vivants, mesquins et jaloux ne sera pas de tout repos, et David devra déployer des trésors de patience et de persuasion pour parvenir à ses fins. Suite de Frontière barbare, paru en 2013 dans la collection Folio SF, mais pouvant se lire indépendamment, Anges de fer, paradis d’acier est l’incursion la plus récente de Serge Brussolo dans la science-fiction. Une nouvelle fois, son talent et son imagination hors du commun font des merveilles.

Critique : Serge Brussolo nous immerge dans une histoire de science-fiction qui frôle la démesure. Les idées qu’il emploie sont proches de la folie, souvent totalement absurdes, mais on se plonge dans le monde qu’il nous décrit. Je devrais plutôt dire les mondes, car ce livre enchaîne les lieux, et ces derniers sont de plus en plus étranges : le cimetière d’avions autour du palais du pape Nothanos III, la planète Almoha, et enfin les mondes souterrains. Les descriptions sont nombreuses et précises . Il faut réussir à suivre l’auteur dans certains univers absurdes qu’il nous dépeint : arbres avec des plumes, moutons qui changent de couleur, etc. À chaque page, le lecteur peut rencontrer une nouvelle trouvaille qui repousse encore plus loin des limites qu’on pensait atteintes depuis longtemps. Les idées partent vraiment dans tous les sens et c’est peut-être un peu trop. Je l’ai apprécié, mais je ne suis pas certain que cela plaise à tout le monde. L’auteur joue avec la religion et la place des dieux . Serge Brussolo aime aussi réutiliser les noms de certains personnages ou de lieux : Almoha, Sigrid, David Sarella etc. Le personnage de David Sarella est égal à lui-même, peut-être même plus en retrait que dans le premier tome : tantôt incertain, tantôt sûr de lui. On se demande s’il est vraiment le héros de l’histoire ou s’il suit simplement le mouvement.

Ce roman est agréable et la lecture recommandée.

Note: 9/10

 

  • Poche: 464 pages
  • Editeur : Folio (29 mai 2015)
  • Collection : Folio SF

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