L’homme craie de C. J. Tudor, souvenons-nous des instants terribles

Et toujours les ombres du passé…

Cela fait longtemps que ce thriller me faisait de l’œil mais ma médiathèque n’ayant jamais daigné se le procurer, j’ai dû attendre de le trouver en promotion sur ma liseuse. C’est désormais chose faite et il est temps de vous parler de cette lecture somme toute plaisante.

Une petite ville tranquille, une bande d’amis qui ne pensent qu’à profiter de chaque minute de l’été avant la reprise de l’école… Cela ne vous fait penser à rien ? L’ombre de Stephen King plane sur les passages se déroulant dans le passé. De nombreuses scènes mettant en scène la petite bande d’amis rendent hommage à l’un des récits les plus célèbres du grand auteur, à savoir ÇA. Pour quiconque connaît l’œuvre de King l’hommage sera évident sans pour autant que cela soit gênant à la lecture. Le récit possède sa propre empreinte et, même si j’aurais personnellement préféré que le récit insiste encore plus sur cette bande de potes que le sort va marquer à vie, il faut reconnaître que l’auteure amène d’une belle façon les thèmes qu’elle veut inclure à son récit, la maladie d’halzeimer, le droit à l’avortement.

La double temporalité est menée avec malice, empilant les mystères et les questions qui trouveront leurs réponses trente ans plus tard. Le suspens est astucieusement dosé pour que l’on est envie de continuer la lecture. Le récit flirte parfois avec l’horreur lors de courtes scènes cauchemardesques ou lors de la scène d’ouverture qui m’a happé et convaincu sur les talents de conteuse de Tudor, la plume de l’auteure est attirée par ce genre comme un aimant cela se ressent énormément. En témoignent les scènes de cauchemars et toutes les inquiétudes autour des dessins à la craie. Pourtant l’ouvrage est bien un thriller, l’auteure a probablement voulu s’en tenir à un récit plus accessible pour sa première publication. Le tout forme un ensemble convaincant mais qui aurait mérité un peu plus de profondeur dans le style.

Un parfum de nostalgie imprègne le récit, y compris les passages se situant de nos jours. Tendresse des jours d’été passé à déambuler avec ses amis, regrets de ne pas avoir pu faire ou dire ce qu’il fallait au bon moment sans parler des griffures du destin qui cicatrisent mal, même trente ans après. Cette atmosphère en teinte sépia se teinte peu à peu d’un rouge écarlate à mesure que le dénouement approche. Un dénouement quelque peu prévisible malheureusement mais qui a le mérite de ne pas traîner en longueur.

L’homme craie signe pour son auteure une entrée convaincante dans le monde du polar. Placé sous l’influence d’une autre grande plume mais avec suffisamment de présence et de d’atmosphère pour se démarquer du reste de la production. Depuis l’auteure a publié un autre polar et un troisième et sur le point de paraître, une auteure suivre donc.

Résumé: Le problème, c’est que nous n’étions pas d’accord sur la manière dont ça avait commencé. Etait-ce lorsqu’on s’était mis à dessiner les bonhommes à la craie, ou lorsqu’ils sont apparus tout seuls ? Etait-ce à partir du terrible accident ? Ou quand ils ont découvert le premier corps ?

  • Éditeur : Pygmalion (17 janvier 2018)
  • Langue : Français
  • Broché : 384 pages
  • ISBN-10 : 2756421731
  • ISBN-13 : 978-2756421735
  • Poids de l’article : 420 g
  • Dimensions : 13.6 x 2.6 x 21 cm

Retour sur l’année 2020 avec mes meilleures lectures polars

Aussi anxiogène, amer et morbide fut-elle l’année 2020 signe aussi ma première année complète en tant que blogueur sur culturevsnews. Une année faste faite de découvertes, d’échanges, de rencontres, souvent virtuelles étant donné la situation actuelle, de déceptions et surtout de lectures passionnantes. Alors que le compteur approche doucement des 130 livres lus, j’ai pris la décision de condenser mes meilleures lectures sous forme de classement séparés en trois parties, une consacrée aux polars, une autre aux récits fantasy, fantastiques et de science-fiction et enfin un dernier focalisé sur la littérature générale. Ce classement, complètement subjectif, réunit aussi bien des nouveautés que des ouvrages parus depuis plus longtemps et chacun d’entre eux pourraient être une idée cadeau pour une certaine fête qui arrive. Pour chacun des titres choisis je mettrais un lien qui ramène à la chronique originale.

1 le sang du bayou de Joe R. Lansdale

Pour la première place du classement je triche un peu le sang du bayou est en effet un groupement de trois romans, une édition colossale qui atteint les 800 pages. Les trois récits sont tous de qualité mais si vous lancez dans cette lecture vous effraie vous pouvez vous contenter de dénicher le second récit de cette édition les marécages. Un récit noir situé dans une Amérique sudiste où le racisme et la ségrégation sont encore les piliers de la société, la plume immersive et évocatrice de Lansdale ne vous laissera pas indemne.

https://culturevsnews.com/2020/10/17/le-sang-du-bayou-de-joe-r-lansdale-quand-le-sordide-et-le-racisme-sont-au-service-dune-jolie-plume/

2 la mort selon Turner de Tim Willocks

On continue avec un auteur qui ne m’a jamais déçu jusqu’à présent, j’ai nommé Tim Willocks. Il signe ici un western moderne sanglant et sans aucune concession ainsi qu’un portrait peu glorieux de l’Afrique du Sud gangrenée par la violence, la corruption et la misère la plus totale.

https://culturevsnews.com/2020/02/10/la-mort-selon-turner-de-tim-willocks/

3 Représailles de Florian Eglin

Encore un roman noir violent et sans concessions, à se demander quelles sombres pulsions sommeillent en moi pour apprécier de tels récits ? Représailles est un traité sur la violence et ses conséquences dévastatrices. Cette œuvre est tel un fauve enragé, il va vous sauter à la gorge et ne plus vous lâcher.

https://culturevsnews.com/2020/03/18/represailles-de-florian-eglin/

4 Tout un été sans Facebook de Romain Puertolas

On enchaîne avec une lecture plus légère mais cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas une certaine profondeur dans ce récit à l’humour omniprésent. L’auteur manie le style et la forme pour une œuvre qui agit comme un véritable bol d’air frais.

https://culturevsnews.com/2020/09/20/tout-un-ete-sans-facebook-de-romain-puertolas-saint-reseau-sociaux-delivre-nous-du-mal/

5 City of Windows de Robert Pobi

C’est un polar addictif qui occupe la cinquième place du classement. Celui qui fut ma première lecture de l’année résonne encore dans ma tête avec son style accrocheur et son récit trépidant mâtiné de critique sociale. Un portrait grinçant de l’Amérique et de sa culture de la violence.

https://culturevsnews.com/2020/01/06/city-of-windows-de-robert-pobi-8-janvier-2020/

6 Sur le ciel effondré de Colin Niel

Un récit d’une noirceur et d’un pessimisme rarement égalé soutenu par une plume aérienne et poétique. Un constat amer sur la Guyane moderne. Un auteur dont il me tarde de découvrir les autres ouvrages.

https://culturevsnews.com/2020/09/30/sur-le-ciel-effondre-de-colin-niel-un-cauchemar-pourtant-bien-reel/

7 L’arbre aux fées de B. Michael Radburn

Au moment de constituer la liste des ouvrages qui devait figurer dans ce classement je me suis surpris à sélectionner celui-ci plutôt que d’autres. L’arbre aux fées fût une lecture plaisante mais pas une pépite non plus. Pourtant la plume poétique de l’auteur teintée de mélancolie, ses descriptions d’une ville en voie de disparition et ses paysages enneigés accaparent encore mon esprit. Un auteur que je vais suivre avec attention et que je rapproche de l’auteur islandais Arnaldur Indridason de par son récit profondément empathique.

https://culturevsnews.com/2020/09/27/larbre-aux-fees-de-r-michael-radburn-un-voyage-enchanteur-empreint-dune-poesie-melancolique/

8 Bienvenue à Gomorrhe de Tom Chatfield

L’année 2020 a également été pour moi l’occasion de signer mon premier partenariat avec une maison d’édition, les Éditions Hugo m’ont en effet accordé leur confiance depuis quelques mois pour chroniquer leurs romans policiers. Bienvenue à Gomorrhe fût une excellente surprise, un techno-thriller sur fond d’espionnage qui donne l’impression de se passer dans un autre monde tant il décrit un univers angoissant mais malheureusement terriblement réel.

https://culturevsnews.com/2020/10/15/bienvenue-a-gomorrhe-de-tom-chatfield-inutile-de-lutter-vous-avez-deja-perdu/

9 Brasier noir de Greg Iles

Décidément les ravages du racisme et de la ségrégation auront marqué mon année de lecteur. Même si l’auteur m’a déçu avec le second volet de sa trilogie, il faut reconnaître que le premier volume est un récit d’une noirceur écarlate qui jette une lumière aveuglante sur la mentalité sudiste. Un récit dense mais à la narration claire qui vous entraînera dans un maelström d’horreur.

https://culturevsnews.com/2020/04/07/brasier-noir-de-greg-iles-actes-sud/

10 Ceci n’est pas unechanson d’amour d’Alessandro Robecchi

On termine avec un polar italien des plus jubilatoires. Ce récit qui oscille entre l’humour et le cynisme propose de vous emmener à travers les rues de Milan dans une virée dont tout le monde ne ressortira pas indemne. Une réflexion sur la société du spectacle audiovisuel qui en reprend les codes pour nous offrir un régal de situations comiques et tendues.

https://culturevsnews.com/2020/08/20/ceci-nest-pas-une-histoire-damour-dalessandro-robecchi-20-aout-2020/

Le dernier hyver de Fabrice Papillon, du girl power bien gras

Il est temps de parler de ce qui restera sans doute comme ma pire lecture de l’année 2020. Un roman ésotérique dans la pire veine de ce sous-genre de la littérature. C’est bien simple rien ne va dans ce roman ni la narration, ni les personnages ni l’histoire et encore moins le style. Nous allons détailler tout ça point par point. Je préfère avertir tout de suite que ma chronique risque d’être émaillé de spoiler donc ce qui ne l’on pas lu passez votre chemin, à moins que vous n’en ayez rien à faire.

Honneur au problème qui est mine de rien le moins problématique. La narration est extrêmement rigide, avec les classiques flashbacks qui n’apportent rien et entraîne des dialogues redondants en fin d’ouvrages mais c’est malheureusement une pratique courante du genre. Ce qui m’a le plus dérangé c’est la manière dont l’auteur étale son savoir et nous force à l’assimiler comme si l’ont été des oies à gaver. Ces chapitres sont l’occasion pour l’auteur de hurler à travers les pages de son livre « TU LE VOIS QUE JE SUIS CULTIVÉ, HEIN TU LE VOIS ? ». Le travail de recherche en amont de l’écriture est bien sûr à saluer mais la manière de faire, rigide et scolaire, est rébarbative. Les chapitres au présent sont heureusement plus digestes , les scènes d’enquêtes et d’actions offrent les rares moments plaisants du récit, mais comportent d’autres soucis.

Car cette narration est au service d’une histoire fantasque et incohérente où on est censé croire que des commandos féminins parviennent à s’introduire dans les plus grands centres de reproduction de la planète sans aucun souci et sans qu’aucun service de sécurité ne réagisse ou ne soit même alerté de leurs plans. On est aussi sensé croire que des scientifiques initiés au plus grand secret alchimique laissent de côté leurs créations imparfaites sans les placer sous étroite surveillance, et que cette même création puisse mettre sur pied sa propre organisation sans que personne ne le remarque. La fin du récit enchaîne tellement d’incohérences que c’est difficile de toutes les citées.

Et ces soucis ne sont rien à côté des personnages. Ne comptez pas vous attacher à l’un d’entre eux, l’auteur s’est efforcé de les rendre tous plus antipathiques les uns que les autres. Mis à part l’héroïne principale, Marie qui est aussi lisse et transparente que l’on est en droit d’attendre de ce genre de personnage qui est destiné à se faire manipuler pendant tout le récit. Tous les autres personnages sont des abrutis complets à commencer par la mère de Marie, Élisabeth, scientifique de génie qui préfère abandonner l’une de ses créations à son sort, plantant ainsi les germes de la haine, plutôt que de la surveiller étroitement. Création qui, à l’instar des grands antagonistes des blockbusters hollywoodien, préfère expliquer tous les détails de son plan stupide plutôt que de prendre la fuite. Tous les autres personnages sont écrits de manière à illustrer le thème principal du récit, à savoir, la guerre des sexes.

Car oui le roman se veut féministe, ou se croit féministe alors même que plus de la moitié de ses personnages féminins sont des têtes à claques insupportables. Pour nous prouver que les femmes valent mieux que les hommes, plutôt que d’écrire des personnages crédibles et attachantes, l’auteur s’est évertué à rendre ses personnages masculins détestables, sans aucune nuance. On a donc droit à des scènes pitoyables où la concupiscence et la perversité des méchants mâles est porté à son paroxysme sans que cela ne s’avère pertinent. Même le premier rôle masculin, ce pauvre Marc Brunier, fait preuve de condescendance envers ses subordonnée féminines qui ont pourtant fait leurs preuves, pour un chef d’équipe ce comportement de mâle alpha mal dégrossi et pas diplomate pour un sou paraît peu crédible. Le cause des femmes mérite beaucoup mieux que ce manifeste sans âme, creux et aussi bourrin qu’un sketch de Jean-Marie Bigard.

On va finir sur un point plus discret mais qui m’a gêné au cours de ma lecture. À de nombreuses reprises l’auteur fait preuve d’un ton méprisant envers ses personnages et le monde qui les entourent. Son style se fait hautain et insultant à de nombreuses reprises, et pas uniquement lorsqu’il s’exprime par le biais de ses personnages. Certains mots, certaines expressions, traduisent un état d’esprit condescendant, au mieux, et contribuent à auréoler l’ouvrage d’une atmosphère particulièrement malsaine et nauséabonde tant il donne l’impression d’être plus une déclaration d’intention qu’un réel récit divertissant.

Voilà j’en aïs finis avec cet ouvrage duquel je ne parviens pas à sauver le moindre élément. Ce qui m’amène à penser qu’il va vraiment falloir que je sois plus sélectif dans mes lectures. En commençant peut-être à supprimer les polars ésotériques qui, bien souvent, ne sont que des passerelles pour de mauvais écrivains servant à véhiculer leurs principes nauséeux.

Résumé: Août 415 après J-C. : La ville d’Alexandrie s’assoupit dans une odeur âcre de chair brûlée. Hypatie, philosophe et mathématicienne d’exception, vient d’être massacrée dans la rue par des hommes en furie, et ses membres en lambeaux se consument dans un brasier avec l’ensemble de ses écrits.
Cet assassinat sauvage amorce un engrenage terrifiant qui, à travers les lieux et les époques, sème la mort sur son passage. Inéluctablement se relaient ceux qui, dans le sillage d’Hypatie, poursuivent son grand œuvre et visent à accomplir son dessein.
Juillet 2018 : Marie, jeune biologiste, stagiaire à la police scientifique, se trouve confrontée à une succession de meurtres effroyables, aux côtés de Marc Brunier, homme étrange et commandant de police de la  » crim  » du Quai des Orfèvres. Peu à peu, l’étudiante découvre que sa propre vie entre en résonance avec ces meurtres.

  • Broché : 624 pages
  • Dimensions du produit : 14.1 x 4.5 x 22.6 cm
  • ISBN-13 : 978-2714475435
  • Poids de l’article : 662 g
  • Éditeur : Belfond (5 octobre 2017)
  • Langue : : Français

CRITIQUE A CHAUD : TENET / LA SUPERPRODUCTION AU SECOURS DES SALLES DE CINÉMA (sans spoiler)

C’est «LE» film de la fin d’été: «Tenet», blockbuster malin entre espionnage et science-fiction, signé du prince du box-office Christopher Nolan, est attendu comme le messie par les exploitants de salles déprimés par le contexte sanitaire.
Un film réalisé par Christopher Nolan avec John David Washington, Robert Pattinson

Critique: Ragnarök Saison 01 / NETFLIX

Salut à tous !
Nouvelle critique sur Ragnarök série TV de Adam Price avec David Stakston (Magne), Jonas Strand Gravli (Laurits) sur Netflix
#ragnarok #Netflix #nord

https://www.youtube.com/watch?v=Qt3GdbysFNE&feature=youtu.be

L’interview de Serge Brussolo pour la sortie de ANATOMIK le 13/11/2019

Avec la parution du nouveau livre de Serge Brussolo aux Éditions Bragelonne voici une interview en 18 points avec le maitre français souvent comparé à Steven King.

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Site de Serge Brussolo : https://brussolo-serge.pagesperso-orange.fr/

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L’interview de Serge Brussolo

1 : Que diriez-vous pour convaincre que l’histoire que vous écrivez est intéressante, importante et utile ?

Cela fait quarante ans que je publie, j’ai mes lecteurs fidèles, je pense que je n’ai pas à les convaincre que ce que j’écris va les intéresser, ils me font confiance. C’est du moins ce qui ressort des réactions que je reçois. Ils aiment le style d’histoires que je raconte, ils savent à quoi s’attendre. J’écris pour eux. Je n’ai jamais cherché à m’attirer un public généraliste, ce qui m’obligerait à faire trop de concessions. Certains éditeurs m’y ont encouragé, certes, mais ça ne me convenait pas. Le réalisme n’est pas mon élément naturel.

: À partir de quand le passé devient-il assez vieux pour être de l’histoire ? L’humain (dans le récit) pourquoi est-il un animal qui trébuche vingt fois sur le même caillou ?

La notion de passé est très relative. Quand j’évoque devant un jeune homme les événements de 1968 ça lui paraît aussi lointain que les Croisades ou la Guerre de Cent ans, or pour moi c’était hier. Einstein a écrit quelque chose à ce propos, je crois. L’homme ne tire jamais les leçons de l’expérience, il recommence perpétuellement les mêmes erreurs, c’est comme ça depuis la nuit des temps, et il en ira ainsi jusqu’à ce qu’il détruise la planète. Ce qui évolue, en revanche, ce sont les outils de destruction dont il dispose.

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3 : Comment démêler le vrai du faux dans les récits écrit pour un public qui dans son premier abord ne cherche pas un livre dit réaliste ?

Si l’on commence à se poser ce genre de question, on se gâche d’emblée le plaisir de la lecture ! Le lecteur doit jouer le jeu, se laisser prendre au piège du récit, s’abandonner au rêve, sinon ce n’est pas la peine d’ouvrir un roman, mieux vaut lire des traités de sociologie ou de mathématiques. C’est d’ailleurs pour cette raison que certaines personnes détestent les romans et les jugent inutiles.

4 : Est-il nécessaire d’avoir des connaissances solides dans un sujet pour arriver à en faire un livre ? La confiance que le public accorde à vos récits est-elle dangereuse ?

C’est sûr qu’il est préférable de ne pas dire de conneries dans un contexte réaliste, mais ce n’est pas tellement le domaine dans lequel j’évolue. La Fantasy ne prête pas le flanc à ce genre de critique. Maintenant, si l’on écrit un roman historique, il est préférable de savoir de quoi on parle. Cela dit, je ne vois pas en quoi raconter comment était fabriquée une armure peut s’avérer dangereux… A moins que le lecteur ne s’improvise forgeron ! Mais là cela relève de la bêtise. Il y toujours des esprits faibles, si l’on se met à censurer les livres à cause d’eux, on n’écrit plus rien.

5 : Que pensez-vous  de la multiplication des romans dits best-sellers ces dernières années ?

Les best-sellers ont toujours existé, ça n’a rien d’un phénomène nouveau. C’est le public, les médias et la publicité qui les fabriquent. Ils correspondent à une attente du public à un moment donné. Ils obéissent à un effet de mode, ainsi qu’à un certain conformisme, ce qu’on surnomme « l’effet moutonnier ». Puis le temps passe, et la plupart d’entre eux sont oubliés.

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6 : Voyez-vous le livre dématérialisé comme l’avenir de l’éducation et de l’information, et devrait-il donner plus de visibilité aux jeunes lecteurs ?

Il ne faut pas se leurrer, en tant que grand défenseur (et utilisateur) du ebook, j’ai pu me rendre compte qu’on se heurtait à une terrible résistance du public. Aux USA, le livre dématérialisé fonctionne très bien, il représente le quart des ventes totales du pays. En France, hélas, ce support ne prend pas, on est à peine à 4%.  A l’heure actuelle il est impossible de prévoir si le ebook a la moindre chance de survivre. Il faudrait que le jeune public s’y mette sans tarder car sinon les éditeurs laisseront tomber. Certains n’y croient déjà plus et se montrent très pessimistes. En ce qui me concerne, les ventes dématérialisées représentent 10% des ventes totales.

7 : L’idéologie a-t-elle sa place dans le récit ?

Chaque auteur à ses convictions, l’empêcher de les exprimer relèverait de la censure. C’est d’ailleurs un peu ce qui se passe avec la généralisation du « politiquement correct », des choses ou des mots qu’il ne faut ni prononcer ni évoquer… Maintenant qu’on soit d’accord ou pas avec les idées de l’auteur relève d’un autre débat. Il convient de se méfier de la pensée unique.

8 : Que pensez-vous du travail de Stephen King qui vous est souvent comparé?

Je connais mal Stephen King, je n’ai lu que deux romans : Salem et Shining. Son fantastique n’est pas le mien, il est très ancré dans le réalisme, ce qui n’est pas mon cas. Je préfère le franc délire, les frontières qu’on repousse, voir jusqu’où on peu aller trop loin. 

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9 : Est-il conseillé de juger un roman en s’appuyant sur nos mœurs actuelles ? Peut-elle se transformer en propagande ? 

Encore une fois tout cela est très relatif. La notion d’admiration est toujours tributaire d’un moment historique. Au XIXe siècle on trouvait tel ou tel roman génial, aujourd’hui on estime que ces mêmes oeuvres sont des bouses et leurs auteurs de gros nuls… Il en ira de même pour notre période. Les « grands » auteurs d’aujourd’hui passeront probablement pour des has been dans trois ou quatre décennies… en admettant qu’on lise encore!

10 : Selon vous, est-ce que la science-fiction nous permet de réfléchir à un futur plus ou moins proche et d’éviter ainsi de potentiels dangers ? dixit votre nouveau roman « Anatomik »

C’était, à l’origine, le but de la SF, à travers une métaphore de faire la critique de nos sociétés. Tous les auteurs n’ont pas suivi cette voie, et le genre a peu à peu évolué vers la simple distraction. Dans les livres qui me passent entre les mains, je détecte souvent une idolâtrie excessive de la technique. Une vénération de la Science qui confine à la religion. Ce manque de recul critique me gêne un peu.

11 : Que pensez-vous du paysage de la littérature dite de genre actuel et de son évolution ?

Pas grand-chose car j’en lis très peu. Je suis gêné par le formatage des genres comme le thriller qui ne nous présente plus guère que des histoires de serial killer, et cela depuis plus de vingt ans! ça m’ennuie, et ça a grandement contribué à m’éloigner du genre.`

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12 : Existe-t-il une concurrence entre les auteurs ?

Concurrence je ne sais pas, mais une grosse jalousie, oui c’est sûr, en dépit des grandes claques dans le dos que s’envoient les écrivains. Dès qu’on a le moindre succès, on devient un concurrent, et c’est mal vu.

13: Sont-ils plus suivis pour leur personne que pour leur contenu ?

Non, les auteurs ne sont pas des stars de cinéma. L’écriture reste un métier obscur, qui n’a rien de glamour ni d’excitant aux yeux de la plupart.

14 : L’argent nuit-il au métier ?

Etant donné le faible pourcentage des droits que touchent la plupart des auteurs j’aurais plutôt tendance à reformuler la question en « Le MANQUE d’argent nuit-il au métier? » Rappelons que 90% des écrivains sont obligés d’exercer un autre métier pour survivre. Les médias ne cessent de mettre en avant les auteurs fortunés, mais ils oublient de préciser que ces rares privilégiés sont extrêmement peu nombreux.

15 : Combien de temps passez-vous à écrire et quel sont vos loisirs extérieurs ?  

 Ecrire est pour moi un plaisir, donc un loisir à temps complet. La durée d’écriture dépend du livre, de l’humeur, des événements extérieurs. Trouver les idées peut prendre plusieurs années, l’écriture du manuscrit deux ou trois mois pour le premier jet, viennent ensuite les corrections. Il n’existe pas de règles. J’ai écrit certains roman en dix jours (comme Simenon) d’autres en un an, voire davantage.

16 : Malheureusement le cinéma et vous ne vous êtes pas donné rendez-vous, mais êtes vous cinéphile ?  Quels sont les films et séries que vous aimez ?

Je ne considère pas le cinéma comme une promotion, donc le mot « malheureusement » est de trop. Je n’ai aucun regret, mais plutôt un certain soulagement. J’ai refusé beaucoup de propositions parce que je ne voulais pas voir mes romans massacrés. Les scénarios qu’on me présentait étaient le plus souvent absurdes ou sans aucun rapport avec le livre.

Je n’ai rien d’un cinéphile, je reste un homme du livre. Pour moi, le cinéma est une aimable distraction, rien de plus, ça ne me passionne pas. Si je « regarde » une série, c’est d’un œil distrait, la plupart du temps en faisant autre chose.

17 : Comment voyez-vous votre avenir dans les prochaines années ?

A mon âge il est conseillé de ne pas faire de projets, mais plutôt de profiter de l’instant présent.

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18 : Pouvez nous donnez des indices sur vos prochaines sorties et où en sont vos projets jeunesses comme Peggy Sue où Elodie ?  

Les prochaines sorties sont sur mon site perso, dans les mois qui viennent je compte me focaliser sur l’auto-édition numérique (gratuite) pour des raisons de liberté d’écriture. Les contraintes éditoriales me sont devenues insupportables.  Je n’écris plus d’ouvrages « jeunesse » depuis presque dix ans. Ce cycle était lié à un éditeur, Olivier Orban chez Plon, qui me laissait toute liberté d’écriture (qu’il en soit remercié!) Je ne suis pas certain qu’aujourd’hui on me permettait d’écrire ce genre de texte, donc je préfère m’abstenir, je n’ai pas envie de batailler contre la censure, j’ai passé l’âge.

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Le Jeu du Chuchoteur de Donato Carrisi | 2 octobre 2019

En pleine nuit d’orage, l’appel au secours d’une famille. Autour de leur maison, un homme à capuche qui rôde. La police n’arrive qu’au petit matin. Le spectacle d’un carnage: du sang partout. Mais aucun corps. Ni parents. Ni enfants.

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Chronique : Après le finale plein d’adrénaline et surprenante du tome précédent Maria Elena Vasquez démissionne et décide de devenir mère, abandonnant son travail dans les limbes. Pour la première fois, elle a mis sa fille Alice devant ce qui était sa mission : retrouver les personnes disparues. Maintenant, Elle vit au bord d’un lac, essayant d’avoir une vie normale. Mais l’obscurité qu’elle a toujours ressentie en la cherchant, ne veut pas la laisser partir, et l’arrivée de Johanna Shutton, brise son calme la ramène au pire de ses cauchemars.

Elle verra Mila se lancer dans une course folle contre la montre, en compagnie d’une vieille amie qui ne refuse pas son aide. Et encore une fois, les ténèbres engloutissent le lecteur, lui faisant croire ce qu’il n’est pas, et lui donnant l’illusion d’avoir compris de découvrir alors, après quelques pages, que rien n’est comme il paraît, car…..

Commencer à lire un livre de Carrisi, c’est comme monter sur un siège de montagnes russes et commencer une folle aventure, dans laquelle vous ne pouvez pas prédire où vous finirez, et quels virages vous prendrez. Une fois de plus, nous suivrons Mila dans une enquête quelque peu surréaliste, qui nous mènera dans un monde sans règles, où tous les désirs les plus pervers peuvent être satisfaits, où il n’y a ni loi ni punition, rencontrant des personnages incroyablement caractérisés qui restent longtemps gravés dans l’esprit du lecteur.

Mais c’est le personnage de Mila qui frappe le plus pour le meilleur et pour le pire. Son alexithymie la rend extrêmement originale et sert d’excuse à plusieurs de ses attitudes vraiment incroyables. Sa folle curiosité qui la met en danger et son incapacité à évaluer soigneusement les risques auxquels elle est confrontée, sont des aspects qui finissent par l’isoler de ses amis, mais qui lui permettent presque toujours de garder le sang froid nécessaire pour relier des lambeaux d’indices. Sa force, véritable talon d’Achille, est son désir de savoir et cette pathologie qui ne lui permet pas de ressentir des émotions.

Mais il y a un prix à payer. Le manque d’empathie était une affinité dangereuse avec les monstres qui se nourrissent de la souffrance de leurs victimes sans pouvoir avoir pitié d’elles.
Je veux voir ce qu’il y a derrière le rideau, regarder le magicien dans les yeux et démasquer le tour.

Ici, pour la première fois, nous commençons à mieux connaître Alice, un personnage qui semble destiné à avoir de plus en plus de profondeur, et sur qui pèse l’ombre de ce père qui est si important pour elle, mais qui en réalité ne l’a jamais vraiment connue.

Carrisi est un écrivain incroyablement talentueux, capable de tisser des intrigues extraordinairement complexes, qui captivent jusqu’à la dernière page. Ses fins alors, qui ouvrent toujours de nouvelles lueurs nous laissent avec le désir de découvrir ce qui n’est pas encore arrivé, parce que le mal ne peut pas être arrêté, il y’a toujours quelqu’un qui attend pour frapper dans l’ombre. Pour chaque question à laquelle on répond, il y en a d’autres qui attendent des explications.

C’était un livre que j’ai lu sans pouvoir le clore jusqu’à la fin, et cela m’a vraiment donné des émotions fortes. Il peut être lu comme Autonome mais après avoir lu les précédents, il permet une vue d’ensemble beaucoup plus articulée et détaillée, offrant une expérience de lecture beaucoup plus complète et intéressante, qui ne peut échapper à ceux qui aiment le genre.

Note : 9,5/10

 

  • Broché : 380 pages
  • Editeur : Calmann-Lévy (2 octobre 2019)
  • Collection : Suspense Crime
  • Langue : Français
  • ISBN-10 : 2702166776

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L’Affaire Cendrillon (2 novembre 2016) de Mary Higgins Clark et Alafair Burke

Une ravissante étudiante, un petit ami suspect, un célèbre réalisateur de Hollywood, des millionnaires, des stars du show-biz… et un meurtre jamais élucidé.
Quel meilleur scénario pour Suspicion, célèbre série de télé-réalité qui reconstitue des cold cases avec la participation des proches de la victime ? Encouragée par l’énorme succès de son émission pilote, la productrice Laurie Moran a choisi de s’attaquer à l’« affaire Cendrillon » : l’assassinat de Susan Dempsey, une étudiante retrouvée près d’une somptueuse villa de Hollywood… étrangement chaussée d’un seul escarpin. L’émission pourrait bien faire exploser l’audimat. En braquant les projecteurs sur un coupable plus dangereux qu’on ne le pense…

Chronique : L’affaire Cendrillon, écrit à quatre mains avec Alafair Burke est un récit  palpitant et on se laisse embarquer par l’enquête et ses rebondissements Les deux auteurs connaissent très bien l’art de l’écriture et le suspense est efficace. L’affaire Cendrillon revient sur l’histoire de Susan une étudiante retrouvée assassinée à Hollywood dont l’auteur du crime n’a jamais été identifié.
Pour réaliser son émission Laurie entre en contact avec des proches de la victime. Tour à tour elle va les interroger revenir avec eux sur la nuit du crime en espérant découvrir de nouveaux éléments permettant de lever le mystère.
L’enquête est habilement menée et on se laisse prendre à l’histoire en ayant toutefois quelques doutes sur l’identité du coupable.
Un bon moment de lecture. Le livre se lit rapidement mais l’histoire est très dense. Il n’y a pas de temps mort. En bref, L’affaire Cendrillon n’est pas le meilleur livre de Mary Higgins Clarke mais son alliance avec Alafair Burke nous offre un roman policier percutant et agréable à lire avec toujours la même intensité.

Note : 8,5/10

 

  • Poche: 416 pages
  • Editeur : Le Livre de Poche (2 novembre 2016)
  • Collection : Policier / Thriller

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Dérivations (8 juin 2017) de Fredrik OLSSON

Peu après, à différents endroits du globe, des sites stratégiques subissent des attaques électroniques sans qu’aucune revendication soit faite.
Les autorités sont sur les dents et rapidement le mathématicien et cyber spécialiste William Sandberg apparaît comme le principal suspect.
Or, William est un homme brisé : depuis la disparition de sa fille, son couple est au bord de l’implosion. Maintenant on l’accuse du pire. Il va pourtant mettre tout en œuvre pour découvrir l’origine de ces actes terroristes.
Car peu de temps avant le black-out, il a reçu un e-mail anonyme.
Et William sait que seule la découverte de l’identité de son expéditeur lui permettra de prouver son innocence.
Mais son ennemi semble toujours avoir un coup d’avance sur lui..

Chronique : Ce long roman de près de 750 pages ne laisse aucun répit et ses multiples rebondissements surprennent par leur caractère parfois improbable. Mais le lecteur le sait : on ne lui dit pas tout dans la fiction comme dans la vraie vie ! L’auteur suédois nous livre une intrigue qui surfe entre l’espionnage et le polar, en plus d’être une réflexion sur notre mode de communication actuel, les limites de l’usage abusif de la haute technologie et la hiérarchisation de nos valeurs. L’écriture est machiavélique, le style est diablement efficace avec des fins de chapitres annonçant à l’avance certains événements qui ne seront détaillés que plus tard. Les scènes d’action sont très visuelles et riches en détails nourrissant un rythme enlevé. Une coupure de courant générale,un attentat?C’est ce que vont chercher William et ses compagnons qui se retrouvent impliqués dans cette situation bien malgré eux pour éviter un désastre et en découvrir l’origine.Une écriture agréable et fluide qui nous entraîne au fils des pages dans un récit passionnant.

Note : 9/10

 

  • Broché: 768 pages
  • Editeur : Fleuve éditions (8 juin 2017)
  • Collection : Fleuve noir

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Viens mourir avec moi (31 mai 2017) de Karen Sander

Düsseldorf. Une avocate est retrouvée sauvagement assassinée chez elle. Le meurtrier a glissé une minuscule poupée nue dans le ventre de sa victime, comme un message à déchiffrer. Ce modus operandi n’est pas sans rappeler une récente affaire au commissaire Georg Stadler, qui sollicite l’aide de Liz Montario, psychologue et profileuse reconnue. Liz accepte de collaborer. Mais très vite, elle devient la cible de menaces et de lettres anonymes émanant de quelqu’un qui en sait apparemment long sur elle. Lorsqu’une de ses amies subit le même sort que les précédentes victimes, Liz doit se rendre à l’évidence : l’homme qui la poursuit et le tueur recherché sont une seule et même personne. Un thriller vertigineux, best-seller en Allemagne, qui révèle un duo à suivre

Chronique : Un thriller psychologique dans une ambiance du film à la Seven, voir le silence des agneaux avec un peu d’Agatha Christie modernisé. Tout est un symbole. L’exploitation qui en est faite par Karen Sander nous emmène sur des chemins métaphysiques. Avec ses faux airs de ressemblance avec des films et d’autres auteurs, avec ce roman vous n’allez pas l’oublier pas une fois refermée. Plusieurs raisons à cela, d’abord la structure très bien construite et qui vous tient en haleine à chaque page qui en distillant des bribes de solutions qui s’avèrent parfois justes et d’autres fois qui vous mènent sur une fausse piste. Ensuite l’histoire est vraiment bien vue avec une intrigue originale qui évite les ressorts éculés des polars avec serials killer et meurtres en série. Enfin les personnages qui sortent là encore des stéréotypes habituels et chacun à ses propres zones troubles et n’est pas en tous les cas pas le héros de roman habituel. Pas d’hésitation, à lire d’urgence !

Note : 9,5/10

  • Broché: 388 pages
  • Editeur : Albin Michel (31 mai 2017)
  • Collection : Spécial suspense

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